par Jean-Baptiste Thoret
26 mars 2018 - 18h52

The Dark Knight : le Chevalier Noir

VO
The Dark Knight
année
2008
Réalisateur
InterprètesChristian Bale, Heath Ledger, Aaron Eckhart, Gary Oldman, Morgan Freeman, Michael Caine
éditeur
genre
notes
critique
7
10
label
A

L'armure de Batman, créée par Bob Kane en 1938 et astiquée par Tim Burton en 1989, n’en finit plus de se noircir. De retour dans un épisode de 2h32 qui évoque plus une fresque coppolienne qu’un roller coaster pour mangeurs de pop‑corn assoupis, le Jocker aspire le récit vers les abîmes du chaos et théorise un monde hanté par la trouille du terrorisme, de l’horreur arbitraire et de l’apocalypse tranquille. Interprété par le jeune Heath Ledger (décédé juste après le tournage d’une overdose), le Jocker de Christopher Nolan, balafre rieuse sur les joues et répliques nihilistes à la pelle, supporte non seulement l’intégralité du film au point d’éclipser le mono‑expressif Christian (Batman) Bale, mais détermine son humeur.

Tourné à Chicago, The Dark Knight continue d’explorer les arcanes criminels de Gotham City, ville passée en deux films (Batman Begins et celui‑ci) du style néo‑baroque des années 1980 à la froideur géométrique d’une cité sous tension, en proie à une vague d’attentats meurtriers et d’assassinats en chaîne. État d’alerte, séquences de panique, hyperviolence du bonhomme, le Jocker s’invite dès l’ouverture du film afin d’en fixer les nouvelles règles. Un groupe de malfrats, flanqués de masques de clown, dévalisent une banque abritant l’argent sale de la pègre. Au terme de l’opération, l’équipe s’est autodétruite à l’exception d’un seul homme, le Jocker, qui fait irruption dans le récit et en réglera jusqu’au bout la trajectoire, les embardées et les accélérations.

Via l’escalade de la violence entropique et irrationnelle perpétrée par un psychopathe, qui doit autant à Mabuse le joueur qu’à Ben Laden le barbu, The Dark Knight enterre sur un mode tragique (un peu trop ?) un rapport au Mal pré‑11 septembre, et inaugure l’ère d’une menace indéchiffrable (pourquoi, comment, dans quel but… des questions qui ne traversent pas l’esprit du Jocker), et imprévisible. Fini le temps de la mafia et de ses morfalous en costards Soprano, fini le temps du Bien et du Mal avec chauve-souris au centre, le Jocker incarne d’emblée une menace nouvelle, amorale, gratuite, qui ne vise qu’à installer pour le plaisir (« Pourquoi autant de sérieux ? », ne cesse‑t‑il de répéter) le spectacle d’un chaos intégral. Face à lui, un flic aussi déterminé qu’impuissant (Gary Oldman), un procureur intègre qui finira défiguré par le désir de vengeance et notre héros capé, alias Bruce Wayne, lancé comme une boule de billard tonitruante mais impuissante sur le tapis de jeu du Jocker.

Un trio d’individus et de forces complexes qui atomise très vite le schéma type du comics movie (« very nice guy versus very bad guy ») pour un attelage étrange et plutôt réussi, entre franchise à honorer (mais aucun ludisme au cours des séquences d’action), génie du Mal et du troisième type pariant sur la part sombre des individus (formidable séquence cornellienne où les otages de deux ferries doivent choisir entre eux et les autres), et trois hommes déboussolés qui ne comprennent pas le principe de l’action démotivée. Ici, les intérêts permutent au fil des minutes. Les mains propres se salissent en un coup de téléphone, les héros de la Loi tombent de leur piédestal comme des mouches, les contre-attaques de Batman et consorts se transforment en opérations suicides.

Si l’on ne manquera pas, à raison, d’insister sur le fantôme du 11 septembre qui hante chaque recoin du cadre, le film de Christopher Nolan ne s’en tient pas à ce programme, devenu d’ailleurs omniprésent dans la fiction hollywoodienne récente, mais développe le paradoxe d’un super‑héros non pas impopulaire ou fatigué (souvenez‑vous de Hancock), mais profondément inadapté à un monde dont la logique lui est désormais étrangère. Batman s’efface à mesure que le Jocker se densifie, tente d’installer à sa place un héros légitimé par la Loi, patauge dans la boue, entre coups d’éclat ressemblant à des coups d’esbroufe et armada technologique ne lui conférant plus aucune supériorité tactique sur son adversaire solitaire. L’homme capé a beau faire vrombir sa moto lunaire ou sa rutilante Lamborghini, faire montre de sa puissance de feu et d’intimidation, il finit par ressembler à un pompier pyromane, soit la version catastrophe d’une Amérique qui se voudrait encore providentielle mais qui n’est plus qu’impuissante.

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The Dark Knight
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Prix : 29,99 €
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28/12/2017
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1 UHD-99 + 1 BD‑50 + 1 BD‑25, 152', toutes zones
2.35
UHD 2 160p (HEVC)
HDR10
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 5.1
Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
Anglais Audiodescription
Allemand DTS-HD Master Audio 5.1
Italien Dolby Digital 5.1
Hongrois Dolby Digital 5.1
Tchèque Dolby Digital 5.1
Polonais Dolby Digital 5.1
Russe Dolby Digital 5.1
sous-titres
Français, anglais, allemand, italien pour sourds et malentendants, espagnol, néerlandais, serbe, tchèque, coréen, chinois, arabe, danois, finnois, grec, hongrois, norvégien, polonais, portugais, roumain, russe, suédois
10
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image

Film démo par excellence déjà en Blu‑Ray (pour rappel, il fut tourné en 35 mm et Imax 65 mm), The Dark Knight est plus beau que jamais en Ultra HD avec Digital Intermediate 4K. Tout est encore plus fort, plus intense, plus brillant, plus juteux : les rouges (le sourire du Jocker est juste démoniaque), les noirs (la grande spécialité de cette trilogie et particulièrement ce film), les reflets des immeubles tout en verre ou encore les lumières de la ville ou du convoi de la police. Même les intérieurs a priori anodins (si toutefois un plan devait être anodin chez Nolan…), comme la salle de réunion de la tour Wayne, sont impressionnants de détails et de classe.

 

La mémorable séquence d'ouverture, rythmée par le tic‑tac cher à Nolan, condense tout le savoir‑faire du maître et des capacités de cette copie 4K UHD absolument dantesque qui, dans un même plan, parvient à rehausser à la fois les blancs et les noirs. Et il en est ainsi pour toutes les couleurs, tous les détails, toutes les textures. Il n'y a qu'à avoir les traces de doigts sur les vitres du bus (invisibles auparavant) pour se rendre compte combien on gagne en précision et en détail. 

 

Quant aux séquences tournées en Imax, elles s'avèrent encore les plus impressionnantes. Ultra‑précises, hyper‑profondes, dotées de contrastes fulgurants et d'un relief exceptionnel, elles irradient l'écran. Il est vrai qu'entre le plus doux Batman Begins et ce The Dark Knight à la photogpaphie bien plus brillante et profonde, nous préférence penche vers ce dernier.

10
10
son

Les Francophones gagnent une piste française DTS‑HD Master Audio 5.1, adieu donc le vieux Dolby Digital 5.1 du précédent Blu‑Ray pas du tout à la hauteur du film et de ses fulgurances sonores. Si le mixage est identique en VO (même punch, même dynamique, mêmes effets, mêmes descentes dans les basses fréquences, même énergie frontale), le jeu original des acteurs est un délice dont on ne peut se passer : « I Believe whatever doesn't kill you simply makes you... STRANGER ! », lance le terrifiant Heath Ledger.

10
10
bonus
- Mode de visionnage interactif avec mini-focus en série et accès séparé à ces petits sujets
- Documentaire sur les gadgets et les outils high-tech du film en HD (45')
- Gros plan sur la psychologie de Batman en HD (46')
- Six épisodes du journal TV de Gotham City en SD
- Galeries photos
- Bandes-annonces
- Spots TV
- Blu-Ray du film et Blu-Ray de bonus

Dommage que Warner n'ait pas intégré les mini‑focus, accessibles en cours de film, dans des lucarnes en surimpression à l'écran. Les deux documentaires, en revanche, sont excellents.

 

À noter, le film est aussi disponible en 4K UHD au sein des coffrets The Dark Knight Trilogy ou Nolan 7 films.

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