Prince of Texas
Près de Houston, durant l’été 1998, Lance et Alvin, deux ouvriers, restaurent le marquage d’une route de forêt endommagée par un énorme incendie l’année d’avant. Alvin, très à l’aise en extérieur, cherche la solitude pour « faire le point » avant de retrouver sa bien‑aimée, la sœur de Lance. Ce dernier, citadin 100% pur jus, ne rêve quant à lui que des week‑ends où il pourra batifoler avec les filles…
On a beau faire : malgré son rythme assez lent, malgré des abus de musique branchée, malgré ses tics typiquement « indé », ce road‑movie ‑en fait une histoire de renaissance‑ reste attachant. Grâce en soit rendue à l’appétit du réalisateur David Gordon Green pour les improvisations. Celles-ci occasionnent des petites pépites de cinéma (exploration de la maison en cendre, baston entre Lance et Alvin, scène finale). Grâce aussi aux deux acteurs principaux (Emile Hirsch et Paul Rudd) qui s’emparent avec gourmandise de leur personnage respectif et jouent, chacun à leur manière, une petite musique de l’immaturité très réussie.
La victoire de Prince of Texas tient aussi beaucoup à son ambiance étonnante : loin de faire confiance aux seules beautés d’une nature en pleine résurrection (un incendie a réellement dévasté la forêt où se situe le film), Gordon Green sait placer là où il faut des touches absurdes (le camionneur alcoolo) et glisse quelques petites pépites fantastiques bien troussées (la dame au chapeau rouge, les colombes dans le camion). Il arrive même à donner un vrai courant de fraîcheur à des scènes pourtant mille fois vues, telle la « murge » monumentale que s’infligent Lance et Alvin aux deux‑tiers du film.
Tout ici aurait pu agacer, à commencer par ce maniérisme patent, et pourtant, au fond, on ressent la totale honnêteté et le dessein magnifique du réalisateur qui croque, avec une émotion sincère, la curiosité et l’émerveillement de la jeunesse.