Rubber
Ceux qui ont vu Steak, le précédent opus de Quentin Dupieux, alias Mr. Oizo, ont déjà une petite idée de la pâte étrange dont ce Rubber est fait. Au creux d’une Amérique endormie, un pneu sort de terre et zigouille tous ceux qu’il croise, façon Scanners de David Cronenberg (1981).
Parallèlement, un groupe de spectateurs munis de jumelles regardent depuis une petite colline la fiction elle‑même, n’hésitant pas à commenter ses rebondissements, son absurdité (« no reason, no reason, no reason… », dit un personnage au début du film) ou son dénouement tarabiscoté. Et puis, une jeune fille sortie de nulle part (Roxane Mesquida qui, de À ma sœur à Sheitan, s’abonne tranquillement aux productions un peu barrées), déclenche bientôt la libido du pneu.
Dupieux manie à merveille le sens de l’absurdité en même temps que son film, évidemment inclassable, rend un hommage vibrant à toutes ces séries B d’horreur des Seventies, de Massacre à la tronçonneuse à L’enfer mécanique. Tourné avec un appareil photo numérique, Rubber est enfin esthétiquement impeccable. Seul bémol : sa durée, soit la limite de tout film concept, qui aurait gagné à ne dépasser l’heure. Une étrange surprise pour spectateurs amateurs de Beckett et de Duel.