AI, intelligence artificielle
Kubrick a eu, au milieu des années 1960, l’idée d’adapter une nouvelle de Brian Aldiss, SuperToys Last All Summer Long, matrice de ce qui allait devenir A.I. Mais 2001 puis Orange mécanique, ses deux films d’anticipation, le conduiront vers d’autres horizons.
Il y revient vingt ans plus tard et écrit un premier script titré Pinocchio, qu’il juge encore insatisfaisant. Puis, découvrant Jurrassic Park et ses prouesses techniques en 1992, Kubrick, convaincu des capacités d’ILM à donner corps au monde futuriste du projet A.I, se remet au travail. La suite est connue : Kubrick écrit un scénario de 80 pages, rencontre souvent Spielberg dont il apprécie les films, et décède en 1999 avant d’avoir pu concrétiser son rêve.
C’est donc Spielberg qui, respectueux des indications données par le maître, se lance en 2000 dans le travail d’adaptation. Le résultat possède forcément quelque chose de schizophrénique, tant le film alterne des séquences qu’auraient pu signer Kubrick (toute la première partie, sombre et glaçante) et des séquences spielbergiennes en Diable, où la naïveté se mêle à une esthétique chatoyante et laide (la seconde partie).
À mi‑chemin du pessimisme métaphysique du réalisateur de 2001 et de l’optimisme béat de celui de Rencontres du troisième type, A.I ressemble à une œuvre un peu monstrueuse où un enfant humanoïde (Haley Joel Osment) placé dans une famille d’accueil, afin de remplacer un fils malade, se retrouve abandonné en pleine nature lorsque ce dernier revient à la maison. Un cas d’école dans l’histoire du cinéma qui, ne serait‑ce que pour les quarante premières minutes du film, mérite évidemment le détour.