Roubaix, une lumière
Roubaix. Un soir de Noël, le commissaire Yacoub Daoud (Roschdy Zem) se retrouve confronté à une affaire de meurtre. Claude (Léa Seydoux) et Marie (Sara Forestier), les deux voisines de la victime, sont finalement arrêtées…
Considéré à tort comme un polar, le dernier film d’Arnaud Desplechin (Un conte de Noël) appréhende plutôt le quotidien d’une brigade policière afin de résoudre les travers d’une ville en perdition. D’interrogatoires en enquêtes de terrain, le commissaire et sa nouvelle recrue, le lieutenant Louis Cotterel (Antoine Reinartz), sondent les motivations des présumés coupables, tandis qu’ils se représentent la ville selon deux points de vue différents. Fraîchement débarqué, Cotterel a besoin de mettre des mots sur sa nouvelle expérience, c’est pourquoi ses réflexions nées d’un monologue intérieur emplissent sa chambre d’hôtel, une fois son service terminé.
La narration s’efface bientôt derrière l’œil aguerri du commissaire Daoud. À l’image d’une sentinelle omnisciente, il ramène sa ville natale (qui est aussi celle du cinéaste) à des souvenirs lumineux disséminés quelque part entre une aire de jeux et le visage d’un habitant de longue date, sans aucun espoir de les réconcilier avec le présent. En atteste la bouleversante séquence d’interrogatoire avec le tandem de meurtrières dans laquelle il évoque leur part d’enfance (solaire ou complexée), avant qu’elles ne paient le prix cruel du monde adulte et d’un environnement aux prédispositions carcérales.
« La vie n’est pas gratuite », leur fera remarquer le commissaire, avec la douceur inquiétante d’un vieux sage paré pour veiller tard. Une réussite.