Ready Player One
Une fois encore, Steven Spielberg donne une leçon de mise en scène avec un film spectaculaire, inventif, malin et divertissant.
En 2045, le monde est au bord de l’explosion. Le dernier refuge de l’humanité, c’est l’OASIS, un univers virtuel inventé par le génie excentrique James Halliday. Juste avant de disparaître, ce dernier a décidé de léguer son immense fortune à celui qui découvrira, après avoir résolu un certain nombre d’énigmes, « l’œuf de pâque numérique » qu’il a pris grand soin de dissimuler dans l’OASIS. Parmi les chasseurs de trésors potentiels, Wade Watts (Tye Sheridan) décide tenter sa chance.
La mise en scène de Steven Spielberg, 71 ans, est d’autant plus surprenante que juste avant d'entrer dans cet univers tout‑numérique, il réalisait Pentagone Papers, un film de facture hyper‑classique au cœur du journalisme US. Adapté du roman de Ernest Cline, Ready Player One est un mix improbable entre la réalité virtuelle d’aujourd’hui et de la nostalgie culturelle des années 80 dont les références pleuvent sans discontinuer. Elles sont même tellement nombreuses qu’il est quasiment impossible de toutes les lister. De la saga Star Wars à la DeLorean de Retour vers le futur en passant par les jeux vidéo Street Fighter et Pac‑Man, tout y passe. Tout, sauf les propres films de Spielberg auxquels il évite soigneusement de faire référence à une ou deux exceptions près (les films de son studio de cinéma Amblin sont véritablement un marqueur des Eighies).
Si Spielberg se fait évidemment plaisir lorsqu'il rend hommage à l'immense Shining de Kubrick dans une séquence aussi hallucinante que réjouissante, il n'en oublie pas pour autant les spectateurs : la caméra fonce, vole, virevolte, tourbillonne et offre des moments de bravoure cinématographiques cathartiques d’une puissance et d’une portée inégalées, à commencer par la course de bolides façon Tron qui vaut absolument le détour.
Entre les mains de Spielberg, l’outil numérique devient une arme absolue capable d’accoucher d'un chef‑d’œuvre cinématographique qui relègue les nouveaux Star Wars et autres Avengers au rang de grossières exploitations mécaniques et sans âme de la chose numérique. Et même si les séquences en dehors du monde virtuel sont plus faibles (les aller‑retour entre monde réel et fictif fonctionnent à merveille), le réalisateur livre un chef‑d’œuvre personnel, radical et futuriste aux accents nostalgiques (difficile de ne pas voir l'ombre du maître sous les traits de l'avatar de James Halliday…). On juste envie de demander à J.J. Abrams, Joe Russo, Anthony Russo et autre James Gunn : alors, les amis, c’est qui le patron ?