American Nightmare
L’argument de départ est plutôt séduisant : dans un futur proche, les Nouveaux Pères fondateurs de l’Amérique ont voté un amendement, le 28e de la Constitution, qui autorise une fois par an chaque citoyen américain à laisser libre cours à sa violence, manière d’assurer par le meurtre légal la paix sociale dans un pays gangrené par la criminalité. Douze heures durant, la Loi déserte les rues, les plus aisés se claquemurent dans des villas bunkerisées tandis que les plus pauvres ‑chômeurs, SDF et autres parias‑ tentent d’échapper à la traque des nantis.
Ethan Hawke, un père de famille qui a fait fortune en vendant des systèmes de sécurité, fait partie de cette classe dominante. Seulement voilà, sa somptueuse demeure, son train de vie un peu arrogant et son enrichissement express ont fait des envieux, et lorsque le soir de « la purge » (titre original du film), son jeune fils décide de secourir un Noir sans‑abri, l’occasion est trop belle pour que le chasseur devienne une proie.
Scénariste du remake d’Assaut, James DeMonaco ne cache pas ses influences, de Carpenter bien sûr dont l’ombre plane sur chaque plan à Sam Peckinpah et le siège mythique des Chiens de paille. Malheureusement, sur le plan de la forme, son film se rétracte très vite sur un home invasion classique, une petite série B correctement troussée mais terriblement répétitive avec fils à papa masqués aux abords de la maison et petite famille apeurée qui va tout faire pour défendre son home sweet home. Aux États‑Unis, on peut transgresser beaucoup de choses, même le corps de sa femme (souvenez‑vous du viol de Susan George dans le film de Peckinpah qu’ignore jusqu’au bout Dustin Hoffman), mais pas cet « impératif territorial » cher au philosophe Robert Ardrey.
Sur le plan du contenu, American Nightmare ne dépasse pas sa note d’intention : attaque classique du mode de vie américain, description pamphlétaire d’une société fondée sur une lutte des classes devenue massacre des exclus et critique sociale soulignée au Stabilo.
Au fond, le film de James DeMonaco ressemble plutôt à un long épisode de Desperate Housewives filmé du point de vue de son refoulé : la paranoïa, la violence latente des zones urbaines protégées, la jalousie du voisin convertie en désir de meurtre et la pauvreté comme fléau à éradiquer ‑DeMonaco dit avoir eu l’idée du film suite à la gestion catastrophique de l’ouragan Katrina par les autorités US‑. Comme Romero en 2005, mais lui en avait tiré Land of the Dead.