par Jean-Baptiste Thoret
30 octobre 2017 - 16h37

Les tontons flingueurs

année
1963
Réalisateur
InterprètesLino Ventura, Bernard Blier, Francis Blanche, Jean Lefebvre, Claude Rich, Venantino Venantini
éditeur
genre
notes
critique
8
10
label
A

« Bougez pas ! Les mains sur la table. Je vous préviens qu'on a la puissance de feu d'un croiseur et des flingues de concours ! »… « Moi, quand on m'en fait trop, je correctionne plus : je dynamite, je disperse, je ventile ! Aux quatre coins de Paris qu'on va le retrouver, éparpillé par petits bouts, façon puzzle »… Et puis l’incunable, le classique, le proverbial : « Les cons ça ose tout ! C'est même à ça qu'on les reconnaît ».



Ces dialogues fameux écrits par Michel Audiard constituent quelques‑unes des pépites célèbres de ces Tontons flingueurs, réalisé par Georges Lautner avec un trio de choc composé de Bernard Blier, Lino Ventura et Francis Blanche. Peu importe l’histoire (sur son lit de mort, le Mexicain fait jurer à un ex‑truand, Fernand Naudin, de veiller sur sa fille et sur ses affaires, mais se heurte bientôt au clan Volfoni), le film de Lautner est une merveille d’humour, d’écriture, de dérision et d’hommages au film noir. De la scène de la cuisine qui cite celle de Key Largo de John Huston à ces gangsters qui semblent tout droit sortis de l’époque rêvée de la Prohibition, Les tontons flingueurs enfile les morceaux de bravoure comme une succession de sketches écrits au cordeau et à la mitraillette. Assassiné par la critique institutionnelle à une époque où la mode était à la Nouvelle Vague (la même année sortait Le mépris de Godard), le film de Lautner a acquis depuis ses galons de film culte.

Suivront Les Barbouzes un an plus tard (même réalisateur, mêmes acteurs, mêmes techniciens, Audiard aux dialogues, Michel Magne à la musique) qui poussera d’un cran le principe parodique et évacuera définitivement toute forme de réalisme (imprimée pourtant dès le premier plan des Tontons). Puis Ne nous fâchons pas (1965), histoire de clôre la trilogie. Un must indémodable qui marque aujourd'hui la première sortie au format 4K Ultra HD Blu Ray de Gaumont (d'autres titres pourraient venir, rien n'est pour le moment programmé).

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4k
cover
Tous publics
Prix : 29,99 €
disponibilité
29/11/2017
image
1 UHD BD-66 + 1 BD-50 + 1 DVD-9, 111', toutes zones
1.66
UHD 2 160p (HEVC)
SDR
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 2.0 (mono)
Français Audiodescription
sous-titres
Français pour malentendants, anglais
7
10
image

Pour des raisons esthétiques et fidélité à l'esprit originel du film, le HDR n'a pas été mis en œuvre sur cette édition 4K des Tontons. Ne cherchez pas dans les réglages du TV, il n'existe pas. Gaumont n'a pas souhaité donner au film des allures de blockbuster, un look clinquant moderniste qui aurait pu déstabiliser voire choquer. Un parti pris qui peut aisément se comprendre.

 

Moralité, les noirs et les blancs sont solides mais aussi un peu grisés, pas forcément très tranchés, ce qui peut parfois ressembler à un manque de contraste. Un sentiment contrebalancé par la luminosité et la précision générale. À noter, les quelques parties floues de l'image sont dues aux prises de vues de l'époque, Lautner utilisait une double lentille novatrice qui faisait le point à gauche et à droite de l'image pour capter au mieux les nombreux personnages présents dans le cadre, se trouvant qui plus est chacun à une distance différente de l'objectif. L'effet de profondeur de champ est palpable aujourd'hui encore malgré quelques zones moins nettes. 

 

Il faut aussi savoir qu'avec sa précision d'image monstre, le scan 4K rend plus visibles les divers défauts d'origine. C'est notamment le cas lors de l'arrivée à la campagne, dans la maison de jeu. Celle‑ci fourmille davantage en 4K que sur le Blu‑Ray simple présent au sein du coffret. D'un côté, l'image 4K gagne en précision, en matière (les rides sont bien visibles, les matières palpables, les nuances apparaissent), de l'autre, les fourmillements sont moindres en Blu‑Ray qui présente un rendu un peu plus doux. Sans HDR, la différence entre les deux ne saute pas immédiatement aux yeux même si elle est réelle. À vous de voir ce que vous préférez.

 

 

7
10
son

Pas d'acidité, des dialogues nets et dynamiques, quatre notes répétées à l'infini et à toutes les sauces (une idée du compositeur Michel Magne), il n'en faut pas plus pour nous satisfaire côté son. Une belle vitalité. Chapeau. 

8
10
bonus
- Commentaire audio de Georges Lautner et Venantino Venantini
- Il était une fois Les Tontons, documentaire de Gilles Mimouni (54')
- La cuisine des Tontons (24')
- Les secrets des Tontons, documentaire de Philippe Durant (22')
- Entretien avec Georges Lautner sur Michel Audiard (18')
- La restauration (20')
- Bandes-annonces
- Blu-Ray et DVD du film

On parie notre billet que vous ne ferez l'impasse sur aucun de ces bonus. Deux d'entre eux (La cuisine et Les secrets des Tontons, petite leçon d'argot) étaient déjà présents au sein du coffret Blu‑Ray Lautner/Audiard paru en 2009, mais dans l'euphorie générale, la revoyure s'impose. 

 

Le module sur la restauration en partenariat avec Celluloid Films et Lobster vaut à lui seul le détour. Le beau brin de technique est décortiqué par les principaux intéressés qui reviennent sur le travail effectué à partir des dix bobines de négatifs image originaux (à l'époque, les copies étaient directement tirées depuis ces négatifs, altérant ainsi au fur et à mesure leur intégrité). Idem pour les bobines son, originales elles aussi.

 

Vous saurez ainsi presque tout du « nitro scan » et de « l'essuyage », techniques consistant à nettoyer le film en circuit liquide fermé afin d'opérer un scan 4K proche de la résolution naturelle des négatifs originaux 35 mm (équivalents à du 5 ou 5,5K). Enfin, les étapes de l'étalonnage et du filtrage (algorithme semi‑automatique) afin de travailler chaque zone et de rattraper quelques défauts passés inaperçus.

 

Au final, un N&B dénué de défauts de pellicule, comme neuf ou presque, qui aurait pu ne jamais exister puisque le film devait au départ être tourné en couleurs. Gaumont, en manque de financement, se cantonna finalement au N&B. 

 

Les autres modules et les commentaires audio, tout aussi indispensables, en disent long sur l'ambiance potache qui régnait sur le tournage et surtout le soir venu, quand tous les copains rappliquaient. Un esprit « grand n'importe quoi fait avec sérieux » qui infuse tout le film. On apprend un peu plus loin que seulement trois pages du roman de Simoni furent reprises pour le film (l'histoire du Mexicain). Une adaptation faite de concert avec Simoni, Audiard et Lautner.

 

Lautner, connu à l'époque pour faire « des films clinquants pour pas trop cher », revient également sur sa mise en scène, son art des gros plans et de la profondeur de champ, visiblement satisfait de ne pas passer trois heures à éclairer une scène avant de tourner, comme nombre de ses confrères à l'époque. Il insiste sur le caractère novateur du film mais ne cache rien de quelques menus ratés, comme les décors qui bougent au passage des comédiens (la péniche reconstituée en studio par exemple). Il explique aussi la présence au casting d'acteurs allemands et italiens.

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