Mad Max Fury Road
Nous voici plongés en plein désert de Namibie, en compagnie d'une bande d'allumés de la bagnole et du pétrole, traçant deux heures durant sur des routes qui ne mènent nulle part, sinon à l'un des grands films d'action de ces dix dernières années.
Australien de 79 ans sorti des radars critiques depuis des lustres, George Miller a attendu trente ans pour poursuivre sa trilogie culte réalisée dans les années 1980, Mad Max, et donner un coup de vieux spectaculaire à l'essentiel de ces blockbusters US (films de super‑héros, Fast & Furious, Transformers, Avengers et consorts) qui, à coups de caméra tremblée, de bastons illisibles et d'effets numériques, ont tant abîmé nos rétines.
Certes, l'intrigue de Mad Max Fury Road tient sur un demi‑ticket de métro (Max, l'impératrice dissidente d'un régime dictatorial et le gynécée glamour dudit dictateur, tentent d'atteindre une zone verte qu'ils n'atteindront pas) mais éblouit par sa mise en scène, sa gestion de l'espace (un grand metteur en scène d'action est d'abord un bon géomètre) et son retour à des effets old school qui redonnent à cette course‑poursuite ultra‑inventive, corps et densité.
Avec ses soldats de Dieu, sorte de djihadistes du V8 qui se kamikazent joyeusement pour atteindre le Valhalla, ses monstres entubés et perchés qui conduisent des véhicules customisés dans la grande tradition du road‑movie australien (souvenez‑vous de Ces voitures qui ont mangé Paris de Peter Weir auquel les véhicules « porc‑épic » rendent hommage) et ce guitar héro délivrant ses riffs heayy metal du haut d'un camion maousse, Mad Max Fury Road scelle l'étonnante rencontre entre Terry Gilliam, Chuck Jones (créateur de Bugs Bunny, Daffy Duck…) et Freaks.
Synthèse parfaite d'un genre post‑apocalyptique toujours balancé entre un sérieux papal (le monde va mal) et une kitscherie loufoque, le film de Miller ose enfin reléguer son héros au second plan (Tom Hardy, seul point faible du film) comme un homme de main peu efficace au service d'une impératrice manchote mais ultra‑déterminée (Charlize Theron) qui, selon toute logique, devrait devenir l'égérie de la suite. Une merveille.