Crimson Peak
Buffalo, à la fin du XIXe siècle. Edith Cushing (Mia Wasikowska), apprentie romancière, vit avec son père, veuf et brave industriel. Depuis la mort de sa mère, la jeune femme reçoit la visite d’un fantôme qui la met en garde contre « Crimson Peak ». Touchée à nouveau par le décès tragique de son père, Edith part s’installer en Angleterre, dans la demeure familiale de Sir Thomas Sharpe (Tom Hiddleston), dont elle s’est éprise. Dans ce manoir gothique, habité également par sa mystérieuse sœur Lucille (Jessica Chastain), nombre de phénomènes confinent au surnaturel. Edith continue à être en proie à des visions de plus en plus terrifiantes…
On distingue clairement les références qui ont façonné l’imaginaire hybride du réalisateur de Pacific Rim (2013) et du Labyrinthe de Pan (2006). Bien sûr, afin que les migrations fantastiques opèrent, l’héroïne quitte une Amérique en plein essor industriel pour venir se perdre dans les corridors d’une propriété séculaire et décrépite. Ainsi, elle n’hérite pas seulement du patronyme mythique rattaché à la Hammer (pour rappel, Peter Cushing défia plus d’une fois Dracula), elle s'immerge (et nous avec) dans les entrailles d’une bâtisse qui suinte l’argile rouge et arbore le tableau d’une matriarche à l’aura maléfique.
La déliquescence des Sharpe s’infiltre à travers ces signaux, à l’instar de Roderick et sa jumelle Madeline dans La chute de la maison Usher, Thomas et Lucille s’enracinent dans « un palais hanté » édifié à leur image : un trou béant à la toiture qui laisse pénétrer la neige glaciale.
La facture flamboyante de Thomas E. Sanders, chef‑décorateur pour le Dracula de Coppola en 1992, fait du décorum gothique une expérience picturale renversante. Une déflagration de couleurs et de lumière qui va chercher sa fulgurance auprès de cinéastes maniéristes géniaux, tels que Mario Bava et Dario Argento. Del Toro ne nous propose pas qu’une histoire de fantômes, il ouvre également une brèche dans le merveilleux. À voir absolument.