Vol 93
Flight 93 s’en tient à la retranscription stricte, sans fard et sans écart, de la tragédie de Manhattan. Filmé en temps réel, le film de Paul Greengrass reconstitue pas à pas la trajectoire du vol 93 de la United Airlines, parti le 11 septembre 2001 de Newark dans le New Jersey et qui s’écrasera 35 minutes plus tard dans un champ de Pennsylvanie après avoir manqué sa cible new‑yorkaise (la Maison‑Blanche).
Greengrass prend le contre‑pied absolu du film catastrophe, et notamment du héros à la Superman. Les passagers embarquent et périssent comme des anonymes. Les terroristes sont filmés comme des psychopathes fébriles. La caméra, tremblotante et pudique, joue la carte de l’effet vérité, etc.
Et après ? Entre la parabole fantaisiste et le docu‑remake, entre le blockbuster sursignifiant et la reconstitution sous‑signifiante (aucune autre ambition chez Greengrass que de remettre en scène un vol ordinaire et de repasser une à une les images‑icônes de CNN pour nous rappeler que tout cela est vrai), Hollywood n’avait pas encore trouvé en 2005, date de sortie du film, son angle d’attaque critique. Comme si le 11 septembre était moins un événement politique et culturel (à comprendre, à analyser, à décortiquer) qu’une image toujours tétanisante, muette et opaque, à rejeter hors‑champ ou à reproduire.