Birdman
Le meilleur de Birdman se trouvait peut‑être dans la bande‑annonce du film, laquelle a sans doute largement contribué au succès d’estime du film. On y voyait Michael Keaton, l’air éberlué et en caleçon, traverser Times Square en pleine nuit et au milieu d’une foule compacte. Malaise d’un acteur de Broadway, lequel se retrouvait expulsé de son théâtre et éprouvait la plus grande difficulté à rejoindre la scène où l’attendaient ses partenaires de jeu.
Cet homme, c’est Riggan Thompson, interprété par un Keaton en grande forme, qui, on le comprend vite, fut une ancienne gloire de Hollywood avant de rejoindre le club très peuplé des acteurs mis sur la touche par l’industrie du cinéma. Afin de se refaire une (petite) santé artistique, Thompson a donc rejoint les planches mais il lui reste à régler l’essentiel : se débarrasser une fois pour toutes du rôle de super‑héros qui fit de lui une star, le Birdman du titre, qui hante aussi bien son esprit que certains plans du film ‑rappelons que Keaton fut le Batman de Burton dans les années 1990‑.
La finesse, la subtilité, l’intelligence en somme, n’ont jamais été les marques de fabrique du cinéma bruyant d’Iñárritu qui, hormis Amours chiennes (premier film et seule réussite de sa carrière), n’a cessé d’enchaîner des films pachydermiques et choraux (Babel, 21 grammes), dégorgeant de sentimentalisme et de discours écrits en majuscules mais qui résonnent creux.
Birdman n’échappe pas à la règle du barnum inarritien : du faux plan‑séquence tapageur dont on cherche pendant deux heures la raison d’être, à la myriade de personnages névrosés que le cinéaste s’obstine à punir, Birdman ressemble à une démonstration de force égotique sur fond de percus jazzy horripilantes, mais qui a su entourlouper l’académie des Oscars (Meilleur réalisateur, Meilleur film). Tant pis.