Mommy
Diane Desprès, surnommée « Die », quadra sexy et mère célibataire, doit désormais partager son quotidien avec son fils de 16 ans, Steve (Antoine‑Olivier Pilon), fraîchement expulsé de son centre d’accueil pour actes de violence. Très vite, sa mère se retrouve à son tour confrontée à son comportement impulsif et brutal, ses accès bipolaires de plus en plus fréquents. Un jour, Kyla (Suzanne Clément), la très réservée voisine d’en face, fait irruption dans leur vie.
Faut‑il encore présenter Xavier Dolan, lequel, à seulement 25 ans, compte déjà quatre films à son actif et accouche d’une bombe hyperactive au format carré (1.1), format propice tant au portrait qu’à la communication des sentiments selon ses propos. Un cadre volontairement serré donc, malléable toutefois selon l’humeur et la personnalité exaltée de son protagoniste, comme en témoigne la superbe séquence où Steve en skate, Wonderwall de Oasis dans les oreilles, élargit le cadre, comme s’il avait le pouvoir de rendre le monde plus grand, son monde gonflé à l’énergie juvénile, excluant toute demi‑mesure.
Après J’ai tué ma mère (2009), le prodige québécois interroge à nouveau la figure matriarcale, source d'amour et de haine. Dans Mommy, on peut aussi bien jumeler la famille recomposée à celle toujours au bord de l’explosion, puisque c’est lors d’une sérieuse dispute entre la mère et le fils que déboule la mutique Kyla. Ce triangle inattendu est visiblement inadapté aux cases conventionnelles, car la monoparentalité, la précarité de Diane, se battant avec et contre son fils malade, le bégaiement de Kyla, changée en « desperate housewife » suite à la perte d’un enfant, les éjectent naturellement du moule sociétal. Ensemble, ils s’échangent autant de vacheries en joual (un patois qui force la teneur mélo‑comique des dialogues) que les silences bienveillants de Kyla s’imposent comme un catalyseur salvateur pour ce cocon en surchauffe.
On se laisse embarquer sur ces montagnes russes, en éprouvant l’âpreté de leurs descentes comme on peut jouir, à la minute suivante, de la vie format XXL. À prendre sans ne rien laisser.