par Nicolas Bellet
08 janvier 2024 - 17h15

The Host

VO
Gwoemul
année
2006
Réalisateur
InterprètesSong Kang-Ho, Byun Hee-Bong, Park Hae-Il, Bae Doona, Ko Ah-seong
éditeur
genre
notes
critique
8
10
label
A

À Séoul, Gang‑du (Song Kang‑ho) tient un petit snack au bord de la rivière où il vit avec sa famille. Un jour, il voit une créature monstrueuse et immense sortir de la rivière, détruisant tout sur son passage. Avec son père, son frère et sa sœur, il va devoir toutefois aller l’affronter, car celle-ci a kidnappé sa fille unique. Mais c’est sans compter l’intervention de l’armée américaine qui met tout le monde en quarantaine prétextant un virus…

 

Un hôte cinéma

The Host, troisième long métrage du réalisateur Bong Joon‑ho, n’est pas forcément celui qui le fit remarquer par la critique, puisqu’il suit de trois ans le génial Memories of Murder, mais c’est sans conteste le film qui le fit connaître du plus grand nombre. Près de vingt ans après sa sortie, si sa force et sa modernité sont toujours aussi prégnantes, ce qui frappe, c’est que le film est déjà un condensé du style très personnel de son auteur. On y trouve les prémisses de Okja bien sûr, le thème de la famille de Mother, le politique de Snowpiercer et surtout le mélange des genres propre à Parasite (Palme d’or 2019). En 2006, Bong Joon‑ho nous écrivait avec The Host sa lettre d’intention, mais personne ne l’avait vue !

 

Sous ses airs de film de genre au postulat classique, The Host (le bien nommé) recèle toutes les obsessions de Bong Joon‑ho et paraît au final bien plus profond qu'on ne pouvait l'imaginer. Si le discours écologique du film à peine voilé est une référence directe au kaijū eiga japonais (« cinéma des monstres »), The Host est avant tout une dénonciation franche de l’ingérence américaine au sein de la société coréenne et de ses ravages. Pour la génération post‑pandémie, il a également un petit côté prédictif assez jubilatoire…

 

En filigrane, The Host évoque essentiellement une société intergénérationnelle, une véritable satire qui nous rappelle que la réussite sociale est de moins en moins accessible et que l’entraide est la seule solution. Enfin, et c’est sans doute en quoi le film est remarquable, The Host est surtout une comédie loufoque qui lorgne vers les premiers délires de Takeshi Kitano.

 

Un film pas bête

On pourrait énumérer à l’envi les qualités du scénario du film, ce serait sûrement oublier ses qualités formelles indéniables. Car The Host allie fond et forme. Vingt ans après, la créature marine a sans doute pris un petit coup de pixel, mais elle reste impressionnante. Non, ce qui frappe, ce sont la construction des plans et le choix des décors, l’esthétisme général, ses sur‑cadrages récurents, la verticalité des décors qui oppose en permanence visuellement le monde d’en haut (les puissants) et celui d’en bas (les égouts), les structures rectilignes des poutrelles du pont et les constructions bétonnées des égouts face à la difformité tout en rondeur de la bête.

 

Avec ce film, Bong Joon‑ho pose les bases de ce qu’il réussira merveilleusement avec Parasite : un film à la fois divertissant et esthétisant où la marginalité devient une force. La mise en scène est au cordeau, imaginative et rythmée, totalement au service du film dans le seul but d’orienter le regard du spectateur pour jouer avec lui à coups de ruptures de ton, de hors cadre et d’autodérision parfois déroutante.

 

Host en couleurs !

Considérer The Host juste comme une simple série B divertissante serait une erreur, mais pourquoi pas après tout. Il peut très bien se regarder comme tel, sans forcément tout intellectualiser. C’est d'ailleurs en cela que le film est un petit chef‑d'œuvre. Au final, le film cultive l’inattendu et pourra forcément rebuter le spectateur qui s’attend à Godzilla à la sauce coréenne. Il est bien plus malin que cela, encore faut‑il s’en apercevoir…

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cover
Gwoemul
Tous publics
Prix : 69,99 €
disponibilité
06/12/2023
image
1 UHD-99 + 2 BD-50, 120', toutes zones
1.85
HD 2 160p (HEVC)
HDR Dolby Vision
HDR10
16/9
bande-son
Coréen Dolby Atmos
Coréen Dolby TrueHD 7.1
Français DTS-HD Master Audio 5.1
sous-titres
Français
7
10
image

Restaurée en 4K en Corée à partir du scan des négatifs originaux 35 mm et du scan des plans avec effets spéciaux, cette copie validée par Bong Joon‑ho lui‑même permet au film de se montrer sous son meilleur jour, contrasté comme jamais, débouché sur toutes les parties souterraines, privilégiant la densité et la force plutôt que la brillance (cela aurait vraiment été trop décalé), les reflets inopportuns ou le boost artificiel des couleurs. La définition monte d'un énorme cran et le film affiche des tonalités jaunes/vertes d'orgine encore plus marquées, et c'est très bien ainsi. De nuit ou sous une pluie battante, on déguste le sens esthétique de son auteur à chaque minute.

7
10
son

Complètement décalé côté son avec des silences placés à certains moment clés et ce quintet de musiciens presque kusturicien, The Host n'oublie pas de localiser de très nombreux effets et bruitages avec une grande précision. Le Dolby Atmos se dévoile peu à peu, pour qui sait y prêter attention. Les apparitions du monstre comme certaines ambiances (les trombes d'eau notamment) sont particulièrement sonores. Et le caisson n'a pas été oublié.

7
10
bonus
- Histoire de famille (documentaire réalisé par Jésus Castro) (52')
- Masterclass de Bong Joon Ho au Grand Rex en fevrier 2023 (72')
- Aux origines de The Host (9')
- Dans la tête du monstre (14')
- De l’animatique au rendu final (11')
- Le design de la créature (11')
- La communauté de Weta (6')
- Rencontre avec Bong Joon Ho (7')
- La famille Park (4')
- 4 scènes coupées (20')
- Tournage au cœur des ténèbres (10')
- Du story-board à l’écran (5 modules )
- Créer le monstre (20')
- Story-board complet traduit en français (334 pages)
- Blu-Ray du film et bonus
- Bande-annonce 2023

Cette édition Collector limitée (garantie zéro plastique) se dote d'un boîtier rigide à fermeture magnétique et d'un visuel panoramique exclusif réalisé par Madison Coby. Un objet conçu pour être collectionné, aussi beau dehors que dedans. N'ayant reçu à la rédaction que le disque 4K UHD de la part de l'éditeur, nous avons pu nous délecter uniquement du module Histoire de famille, le documenaire qui retrouve l'équipe du film quinze ans après. Bong Joon‑ho revient sur son idée de départ : le monstre du Loch Ness qui apparaitraît sur la rivière Han, près de chez lui, là où il a grandi. Il connaît d'ailleurs les lieux comme sa poche, notamment le pont du film et sa superstructure en béton, où il a flanné des heures et des heures dans sa jeunesse. Une idée de départ mêlée à l'épidémoie de SRAS de 2002‑2004.

 

On retrouve certains membres du casting, notamment la jeune fille du film, devenue une jeune femme. Ko Ah-seong revient sur les lieux de tournage avec ses photos argentiques de l'époque, se remémorrant son travail de collégienne entre les prises et sa découverte du monstre pour la première fois (une tête à l'échelle 1 avait été réalisée en latex et animatronic pour certains plans).   

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