Tess
Le plan‑séquence inaugural de Tess, adaptation du roman victorien de Thomas Hardy, détermine d’emblée le sort de sa ravissante protagoniste (Nastassja Kinski). En effet, la rencontre en apparence arbitraire de son père, John Durbeyfield (John Collin), avec le curé, augure personnifié de la révélation, bouleverse à jamais l’existence de la jeune fille.
Les tableaux changeants de la nature érigés par Polanski, abritant l’intensité des vents et dévastant les plaines fangeuses, s’alignent sur l’itinéraire sinistré de l’héroïne, bien malmenée par les affres du destin. Ainsi, Tess courbe sous le poids d’une fatalité cosmique, qui l’expose à l’inexorable variation du cycle des saisons et des expériences maudites.
L’espace torturé accompagne sa pénible progression vers la majesté d’un sanctuaire de menhirs, comme si la moindre des issues salvatrices (la reconnaissance inespérée de son titre, la découverte de l’amour pur et généreux) contenait la promesse inexorable de sa défloration prochaine (au sens propre et figuré). Un chef‑d’œuvre.