Drive
Un jeune homme solitaire est cascadeur le jour, chauffeur de truands la nuit. Quels que soient le travail et ses complices du moment, il suit un code de déontologie extrêmement précis. Un jour, il rencontre une femme et manque à son propre code. Les ennuis commencent.
En obtenant le prix de la Mise en scène à Cannes en 2010, le Danois Nicolas Winding Refn passe du statut de réalisateur confidentiel réservé à une poignée d’amateurs (la trilogie Pusher) à celui de cinéaste mondialement connu. Drive est son septième long métrage et premier film (de commande) hollywoodien. L’occasion pour lui de passer un cap (voire une péninsule) et d’afficher une maîtrise du cadre, de la lumière et de la mise en scène quasi miraculeuse. Son film est si majestueusement réalisé qu'il a le toupet de se passer de scénario, inexistant pour ainsi dire.
Chaque plan, chaque cadrage, est alors l’expression d’un cinéaste qui a su digérer Carpenter, Hill, Mann, Cronenberg et les autres. Metteur en scène jusqu'au bout ses ongles, Refn souligne ses images par une utilisation de la musique, de la violence (effroyable et esthétique) et des ralentis qui subliment une virtuosité dont le cinéma contemporain, qu’il soit américain, français ou autres, devrait se nourrir. On est submergé. Hypnotisé.
Sa réalisation est pensée, ses acteurs transcendés (Ryan Gosling, filmé presque exclusivement en contre‑plongée, est carrément icônisé à travers la ville de Los Angeles, mi‑urbaine mi‑jungle). Et si Refn n’invente rien en recyclant ses modèles, il remet au goût du jour le polar atmosphérique (savamment teinté de romance latente), depuis trop longtemps abandonné par ses « pères ». Et tout en devenant l’un d’entre eux, Nicolas Winding Refn redonne au genre sa noblesse. Le jour où son scénario sera au diapason de sa mise en scène, Refn pourra se targuer d'être une des références cinématographiques incontournables.