le 15 octobre 2008 - 20h00

Xavier Palud et David Moreau

Les deux réalisateurs de Ils, petit film d'horreur qui a fait sensation en France et aux USA, ont succombé aux sirènes d'Hollywood. Du rêve américain au cauchemar de deux jeunes réalisateurs français…
A
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Quand et comment êtes-vous arrivés sur ce projet ?

 

David Moreau : il y a deux ou trois ans. Nous pensions que le remake était déjà en tournage. À l’époque, c’est Renée Zellweger qui était attachée au film.

 

Xavier Palud : nous étions aux États-Unis suite au succès de Ils. Nous avions un certain nombre de personnes à rencontrer à Hollywood qui, potentiellement, pouvaient être intéressées par notre travail. On nous a soumis des projets comme The Eye et La dernière maison sur la gauche de Wes Craven, pour ne citer que les deux plus chauds.

 

Sachant que The Eye était notre dernier rendez-vous, ça s’est fait très rapidement. Nous avons fini de lire le scénario sur le parking, juste avant notre rencontre avec les producteurs. Au départ, ce n’était pas un film pour nous, mais en lisant le script, on a tout de suite vu ce qu’on pouvait apporter. On s’est fait un petit jeu de ping-pong afin de se mettre d’accord sur ce qu’il fallait faire juste avant le meeting. Le rendez-vous s’est extrêmement bien passé et on s’est décidé pour ce film-là.

 

Pourquoi avoir choisi The Eye plutôt que le remake de La dernière maison sur la gauche ?

 

À travers le regard d’une personne qui recouvre l'usage de ses yeux, on pouvait travailler autour de la folie, puisque dans le film, l'héroïne commence à voir des fantômes. Tandis qu'avec La dernière maison sur la gauche, on pensait qu’il fallait aller vers la radicalité pour réussir le film. Il fallait davantage se rapprocher d’un univers à la Gaspard Noé. Et on n’avait pas envie d’aller vers quelque chose de sanglant, mais plus vers un parti pris de suggestion.

 

Lorsque vous avez dit oui, Jessica Alba était-elle déjà sur le projet ?

 

Non. Cela faisait un moment que Renée Zellweger n’y était plus et que personne n'était encore prévu au casting. La production nous a dit de lui laisser un mois pour qu’elle trouve une nouvelle actrice. Trois semaines après, on avait rendez-vous avec Jessica Alba. Comme elle fait partie des cinq ou six actrices qui cartonnent, c’est nous qui passions le casting plutôt qu’elle… Le rendez-vous s’est super bien passé. Au bout d’une heure, on ne discutait déjà plus qu’avec elle. Car il faut savoir que dans ce genre de rendez-vous, il y a l’agent, le manager, le coiffeur, la maquilleuse… tout un staff quoi (rires). On s’est rendu compte qu’elle avait aimé Ils et qu’on partageait le même point de vue sur The Eye.

 

Quand il y a un scénario et qu’en plus il est pas mal, il faut savoir que là-bas, chacun y va de son grain de sel. Et finalement, il y a beaucoup de gens dans ce métier qui n’ont pas forcément la vision de ce qu’est un film à l’arrivée. La grosse différence avec les États-Unis, c’est qu'ici en France, on essaie de faire un maximum de choses en avance. Là-bas, ce qui les intéresse, c’est de tout modifier une fois que le film est bouclé. Exemple : ils ont un budget pour 45 jours de tournage. Eh bien ils vont le faire en 37 et garder le reste pour retourner des scènes. Ils travaillent plus en aval qu’en amont. En fait, ils injectent de l’argent jusqu'à ce que le film ressemble à ce qu’ils veulent. C’est pour ça que les longs métrages américains coûtent de plus en plus cher. Et aujourd’hui, les personnes qui ont l’argent sont plus des financiers que des gens du spectacle. C’est devenu une façon de travailler très différente de celle d'autrefois. Il faut voir ce qui part à la poubelle sur des films qui coûtent entre 100 et 150 millions de dollars ! C’est de la folie ! Je crois que sur Je suis une légende, ils ont retourné près de 60 % du premier montage original !

 

Et 90 % des films de studio sont montés comme ça !

 

Que garderez-vous de cette expérience ?

 

Rien de négatif ou de positif. Je prends ça comme une expérience enrichissante. C’est comme si tu te prenais une grosse tarte dans la figure. Si tu te relèves, c’est bien. Il est certain qu’il vaut mieux se la prendre à 30 ans qu’à 50… Donc pas de problème. Mais en tant que satisfaction de réalisateur, c’est très étrange. On a montré un film qu’on aime moins que ce qu’on a tourné. Il y a plein de choses de nous, mais ce n’est plus tout à fait notre film. Ce qui est terrible, c’est que les défauts soulevés par certains journalistes -et que nous avons été obligés de défendre- résultent pour la plupart des choix du studio. On aurait aimé pouvoir assumer nos propres erreurs et pas celles des autres ! Au final, pour le prochain film que je vais faire en France, je veux être responsable de la première ligne de scénario à la dernière image du montage. Et si je me plante, ce sera de ma faute et je l’assumerai !

 

Il est certain que nos prochains films seront meilleurs que The Eye !

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