Quelle était votre connexion personnelle avec Bob Dylan et Joan Baez. Écoutiez‑vous leur musique, connaissiez‑vous leur histoire ?
Je connaissais évidemment Bob et Joan, mais je n'écoutais pas leur musique de manière assidue. J'ai grandi dans la région de San Francisco, en Californie. Alors, bien sûr, nous chantions des chansons folk comme This Land is Your Land de Woody Guthrie. Je connaissais cette musique mais je ne l'avais pas vraiment explorée. J'écoutais plutôt du blues et de la soul. J’ai une relation beaucoup plus profonde avec le folk maintenant ! Mais le film n’est pas un biopic au sens strict, il ne couvre que la période de 1961 à 1965, qui est une période très spécifique de l'histoire de Dylan.
Vous avez parlé avec Joan Baez pour la préparation du film. Était‑ce important pour vous d’avoir cette conversation ?
J’ai hésité pendant un moment. Je n’étais pas sûre de vouloir le faire. Mais un jour, j’ai appris qu’elle avait parlé avec Ed Norton au sujet de Pete Seeger et qu’elle avait même donné au film tous les arrangements de ses chansons. Elle possédait les droits des versions des morceaux qu’elle interprétait et elle les a transmis à la production du film. J’avais passé tellement de temps à me plonger dans son univers, à écouter ses chansons de manière intime que cela m’a semblé être une chose très « Joan » à faire que de la contacter (rires). Alors je l’ai fait et nous avons longuement parlé au téléphone. Elle a été assez généreuse pour me consacrer du temps.
Joan Baez, votre personnage, dit de Dylan qu’il est un connard mais aussi un génie. Pensez‑vous que le fait d’être un génie excuse tout ?
Mon Dieu, je trouve cela tellement intéressant comme question… C’est fascinant, car les gens ont tous des impressions totalement différentes de Bob, sur ce qu’il représente : un génie ou pas, un artiste fidèle à ses racines folk ou pas, fidèle à son identité ou insaisissable. Je pense que chaque interprétation est unique, et j’adore cela. D’ailleurs, tout le monde a également un avis très différent sur ce film. Par exemple, je l'ai vu avec ma mère à Noël (il est sorti à Noël aux États‑Unis, NDLR), elle était en larmes quand Bob chantait The Times They Are A-Changin'. Pour elle, cette chanson est tellement importante. Elle parle du changement, du fait qu’on ne peut pas rester figé dans une époque donnée. Et puis, le père de mon ami est arrivé et nous a dit : « Oh, ce film est génial, pourquoi avons‑nous changé ? J'aurais aimé que l'on reste dans les années 60, c'était la meilleure époque pour la musique, non ? » Et je me suis dit : « Wow, ce sont deux opinions tellement opposées, sur le même film ».
Pensez‑vous que Dylan est désormais moins un inconnu, pour vous ?
Oui, je me sens certainement plus familière avec Bob, même si je ne sais pas jusqu’à quel point, car il a connu tant d’évolutions. En revanche, je me sens certainement beaucoup plus proche de Joan et de leur relation. Mais Bob reste un peu une énigme…
Et Timothée ? Lui aussi est une énigme ?
Je dirais qu’il est plus communicatif et je ne sais pas si je le qualifierai d’énigme. Qui sait, il a encore beaucoup de chapitres à écrire, il est si jeune. On verra ce qu’il nous réserve…