le 08 avril 2009 - 19h40

Gary Foster

Gary Foster (à droite sur la photo, accompagné du producteur Avi Arad à gauche et du réalisateur Mark Steven Johnson au centre, NDLR), amateur du héros au collant rouge depuis sa tendre enfance, évoquait pour nous, lors de la sortie du film en DVD, l'aventure du tournage. En tant que producteur et ami du réalisateur, il raconte les choix et ellipses nécessaires pour que Daredevil puisse vivre sur pellicule en évitant les pièges de la transposition BD/cinéma. Et ça le connaît, on lui doit également Ghost Rider et Elektra.
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N'est-ce pas trop difficile pour Daredevil d'assumer une position de challenger au milieu d'une pléiade de héros aux super-pouvoirs tous plus impressionnants les uns que les autres ? Il passe après Spider-Man et X-Men, il ne grimpe pas aux murs, n'a pas de rayon laser ou autres griffes en adamantium. Juste des sens ultra-développés et une cécité irréversible…

 

C’est clair, cela a été notre plus gros challenge. Nous savions que nous allions être obligés de développer une technique cinématique qui nous permettrait de rivaliser avec les autres blockbusters précités. Ce que nous avons décidé de faire, c'est de vraiment montrer comment Daredevil perçoit l’environnement qui l'entoure. C'est la réflexion des sons sur les murs qui constitue son monde, et c'est cela que nous devions mettre en avant. Nous avons énormément travaillé ce point au niveau des effets spéciaux. Il fallait que ces moments soient réellement excitants. Vous savez, vous voyez un gars qui saute du haut d'un toit, vous avez peur, et quand en plus vous savez qu'il est aveugle... Le film se devait aussi d'être différent. Pour quelle raison aurions-nous dû créer un ersatz de Spider-Man ? Cela a déjà été fait, et très bien, on n'avait donc aucun intérêt de refaire la même chose. Mark Steven Johnson est un grand fan de Daredevil, il connaît tout du personnage, il a lu tous les épisodes lui étant consacrés. Il nous fallait raconter une histoire qui soit parfaitement en phase avec ce héros et surtout ne pas le trahir. Le jour, c'est un avocat qui essaie de lutter contre le crime en suivant les règles, la nuit, un justicier qui n'applique que sa propre loi. Ce sont ces deux conceptions que nous avons voulu opposer. Comment s'empêcher d'aller trop loin, quelle est sa propre limite ? C'est ce conflit intérieur du personnage qui était important.

 

 

Quand on voit la scène où Daredevil découvre le visage d'Elektra à la faveur des gouttes de pluie qui ruissellent sur son visage, on se dit que le pari est réussi. Cependant, dans la première séquence où le héros apparaît en costume, il laisse mourir un truand. Ce qui n'est pas l'esprit du personnage, en tout cas pas dans le comic book. Pourquoi cette scène ?

 

C'est le plus gros moment, celui qui a amené le plus de controverses. Il y a une planche très connue dans le comic où Bullseye affronte Daredevil dans le métro. Au moment où il va se faire écraser par la rame qui arrive, Daredevil le sauve in extremis. Il y a eu beaucoup de discussions à propos de ce sujet bien précis. Ce que nous voulions montrer, c'est que ce gars a essayé de le tuer… cela aurait pu être de l'autodéfense. Daredevil est arrivé à un moment de sa vie où il est à bout. Il dépasse les limites. Il en a conscience quand, un peu plus tard dans le film, il dit à Elektra : « Tu ne peux pas te venger, en tout cas pas comme ça, cela ne résoudra rien. Crois-moi ». C'est quelqu'un qui est en train de s’apercevoir qu'il va trop loin, qui est sur le point de perdre le sens des réalités. Au moment où nous essayions de définir le caractère du personnage, nous avons choisi cette voie. C'est une décision délibérée faite en connaissance de cause. Nous savions que le personnage du comic n'aurait pas fait ça. Mais il est parfois nécessaire d'opérer ces changements pour renforcer la quête d'identité du personnage, lui donner une plus grande intensité dramatique. Quand le gosse le voit dans la rue et en a peur, il lui dit : « Je ne suis pas le méchant, je suis le bon ». Daredevil dans le film se pose toutes ces questions. Qui suis-je, qui suis-je vraiment ?

 

 

Les costumes d'Elektra et du Tireur, la couleur de peau du Caïd, sont différents par rapport à ceux de la BD. Ces changements sont-ils aussi le fruit d'une réflexion dans l'intensité dramatique ?

 

Pas tout à fait. Pour le costume d'Elektra, la tenue rouge qu'elle porte dans le  comic est pour une actrice totalement inconfortable. Nous avions besoin de dissimuler le harnais nécessaire aux câbles sous le costume que portait Jennifer Garner et on ne pouvait pas le faire avec une tenue trop moulante. De plus, dans la BD qui lui est entièrement consacrée, elle est habillée en cuir noir. Nous avons opté pour ce costume qui lui laissait une plus grande liberté pour les combats et les cascades. En ce qui concerne le Tireur, nous pensons que cela aurait été particulièrement ridicule de le représenter en bleu et blanc avec une cible peinte sur la tête. Ce qui fonctionne en dessin n'aurait pas marché dans le film. Enfin, le choix de Michael Clark Duncan a été évident pour nous. Soit vous voulez un grand acteur, soit vous voulez un acteur qui a la corpulence que requiert le rôle. Nous avons vu des candidats qui étaient blancs de peau et avaient le bon poids, mais qui n'étaient pas nécessairement de bons acteurs. Michael Clark Duncan est un excellent acteur et il a la bonne corpulence. Alors sa couleur de peau n'est pas la même que dans le comic, mais il s'agissait pour nous de trouver celui qui correspondait le mieux au Caïd, et Michael Clark Duncan est le Caïd.

 

 

Ben Affleck a-t-il été Daredevil dès le départ ?

 

Quand nous avons commencé le tout premier casting, Ben n'était pas disponible pour jouer le personnage. Il était en train de faire un autre film. Quand on lui a envoyé le script, on lui a demandé s'il voulait considérer le rôle du Tireur. On pensait que comme le personnage était moins présent que le héros, il aurait le temps de jouer cette partie-là. Il nous a clairement fait savoir que c'était un grand fan de Daredevil et qu'il adorerait l'incarner au cinéma. Il a demandé s'il n'était pas possible de reculer la production de quelques mois pour qu’il puisse le faire. On lui a répondu que bien sûr, on pouvait l'attendre, d'autant plus que les autres personnes auxquelles on avait pensé au départ n'étaient pas non plus disponibles dans l'immédiat, notamment Vin Diesel.

 

 

Mark Steven Johnson a-t-il eu besoin de vous convaincre pour réaliser son premier film avec un budget aussi énorme ?

 

C'est un ami, c'est mon partenaire, on a essayé de monter ce projet pendant sept ans. Vous savez, il a fait l'unanimité auprès de tous les comédiens du film, et au départ, ce n'était pas évident pour eux de faire confiance de la sorte à un jeune réalisateur. Je suis fier du fait que sa passion pour le personnage soit restée intacte pendant toutes ces années et qu’elle ait été palpable chaque jour de la production et du tournage. Ne serait-ce que pour le choix du costume, il a dû se battre avec les studios pour leur expliquer ses décisions, il leur disait : « C'est Daredevil, c'est comme ça qu'il est, c'est ce que vous avez acheté ». Chacun avait son opinion sur le sujet, ils avaient la trouille que ce soit ridicule. Mais Mark a tenu bon : « Ce que vous me dites, c'est autre chose, ce n'est pas lui, appelez-le autrement mais ne me dites pas que c'est Daredevil ». Et ces discussions, voire ces engueulades sur l'aspect des costumes et l'aspect plus général du film, ont duré tout le temps du tournage. Mais grâce à cela, je pense que le film vieillira bien.

 

 

Est-il pensable d'envisager un jour un cross-over au cinéma entre Daredevil et un autre personnage de Marvel comme Spider-Man ou X-Men ?

 

J'adorerais un jour pouvoir avoir un cross-over. Mais c'est très difficile, les licences de ces personnages sont si minutieusement négociées par les studios… Pour ma part, je serais ravi de pouvoir voir Spider-Man et Daredevil à l'écran, même si cela semble trop compliqué. Par contre, X-Men et Dardevil appartiennent au même studio. Mais je pense que c'est quelque chose qui n’est pas prévu…

 

 

Dernière question. Pourriez-vous nous donner le numéro de téléphone de Jennifer Garner ?

 

(Il rigole). Elle est très belle. Si vous venez à Los Angeles, mettez-moi le grappin dessus et je vous la présenterai.

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