Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu
Après la parenthèse solaire ouverte par Whatever Works, son opus précédent, Woody Allen revient à la noirceur de Vicky Cristina Barcelona et brosse ici le portrait d’une douzaine de personnages tous empêtrés dans des problèmes existentiels.
La formule peut sembler un brin répétitive, mais maniée avec élégance, comme c’est le cas ici, elle produit encore des éclats. Il y a d’abord Alfie (Anthony Hopkins), un sexagénaire qui n’assume pas de vieillir et court après une jeunesse factice (se remarier avec une femme jeune, porter des tenues de jeunes, parler jeune, etc.). Son ex‑épouse ne vaut guère mieux : elle tombe sous l’emprise d’une voyante (d’où le titre qui évoque une prophétie), dont la présence va devenir pour le moins envahissante. Et puis il y a leur fille Sally (formidable Naomi Watts), mariée à un romancier que personne ne publie, et qui va bientôt s’amouracher d’un galeriste ténébreux (Antonio Banderas).
Tout ce petit monde chancelant va et vient, se croise parfois, échange ses pathologies, et illustre à merveille cette citation de Shakespeare ouvrant le film : « La vie est un récit plein de bruit et de fureur, qu'un idiot raconte et qui n'a pas de sens ». Les images sont chaudes, les intérieurs bienveillants, mais l’issue, elle, est forcément fatale. Une bonne surprise.