Vivre, mourir, recommencer 3D
Cela fait déjà quelques années que Doug Liman joue à Hollywood une petite musique singulière, soit une manière assez subtile de tordre des blockbusters, des films de commande qui, sans sa griffe, auraient rejoint illico le cimetière des produits formatés et jetables.
La mémoire dans la peau, premier volet de la tétralogie Jason Bourne, a ainsi posé, avec son espion amnésique, certaines des bases essentielles du thriller d'action des années 2000.
Avec Edge of Tomorrow, Liman s'empare d'un autre genre, le film de science‑fiction, et tente de le renouveler en le croisant avec un principe narratif directement emprunté au fameux Un jour sans fin de Harold Ramis. Rappelez‑vous, dans ce film, Bill Murray interprétait un journaliste météo contraint de revivre la même journée dans un bled paumé des États‑Unis.
C'est au même syndrome de répétition, à la même malédiction, que le commandant William Cage (Tom Cruise, très bon) est confronté : tandis que les extraterrestres ont envahi et dévasté une grande partie des Nations, Cage est envoyé de force pour participer à une bataille qui, dès ses premières minutes, tourne au fiasco. Cage est tué mais se retrouve, vivant, catapulté au point de départ et obligé de revivre le même combat. D'abord déboussolé, il comprend vite que cette bizarrerie lui permettra d'apprendre de ses défaites, comme un gamer qui parviendrait à passer un niveau supérieur après plusieurs tentatives ratées.
Tout l'intérêt de Edge of Tomorrow (étrangement renommé Vivre, mourir, recommencer pour sa sortie vidéo) tient dans son script, plutôt astucieux, et dans sa star, Tom Cruise, toujours aussi impliqué et crédible.
Mais c'est aussi son seul intérêt : Doug Liman s'amuse visiblement avec son scénario (pourquoi pas ?) mais ne prend pas suffisamment au sérieux, ni le genre, la SF, avec ses extraterrestres plutôt laids, ni le suspense que son récit produit (Cruise parviendra‑t‑il à débusquer le cerveau des aliens ?). Le réalisateur de Jumper atteint ici ses limites, une espèce de désengagement cool, incapable de produire de l'émotion, du souffle, un style qui vous empoigne, ou même de l'ironie, à la manière de Paul Verhoeven et son Starship Troopers. Why not ?