Une exécution ordinaire
Moscou, 1952. Anna (Marina Hands), officiellement médecin urologue et officieusement magnétiseuse dans un hôpital de banlieue, essaie d’avoir un enfant avec son mari, un physicien désabusé (Édouard Baer). Follement amoureux l’un de l’autre, ils vont hélas être séparés tragiquement : le don d’Anna intéresse Joseph Staline en personne (André Dussollier), très malade. Il va l’arracher à son mari par la terreur, la poussant à s’en séparer par de terribles menaces…
Avec Une exécution ordinaire, l’auteur Marc Dugain met lui‑même en scène ses propres écrits, ou tout du moins une partie, puisque le récit de cette praticienne prise au piège par un patient dictateur n’est qu’un mince extrait de son roman éponyme. Ici, la petite histoire permet d’illustrer celle avec un grand H, brossant par petites touches le portrait d’un tyran aussi cruel qu’intelligent, soufflant sans cesse le chaud et le froid comme pour mieux désorienter sa proie.
Si André Dussollier s’en sort avec les honneurs dans son interprétation du « Petit père des peuples » (le maquillage et les postiches garantissant une troublante ressemblance), tout comme le couple Marina Hands/Édouard Baer, au jeu subtil, le film, entièrement tourné en langue française, manque cruellement de crédibilité. Même si l’on comprend évidemment les motivations économiques d’un tel choix, le russe aurait permis une tout autre immersion, et évité l’aspect trop théâtral.
Privilégiant l’intimisme et l’efficacité des dialogues, Marc Dugain semble hélas oublier de faire du cinéma. Le rythme lancinant et la mise en scène manquant d’ampleur ne permettent pas au film, à mi‑chemin entre reconstitution et fiction, de traduire le sentiment d’oppression et de crainte qui planait sur Moscou à cette époque, mais aussi l'inébranlable instinct de survie et d'amour des opprimés. Un long métrage au propos puissant, hélas contenu par un manque d’ambition formelle et d’émotion.