par Emilien Villeroy
18 novembre 2024 - 15h32

Une amie dévouée

année
2024
Réalisateur
InterprètesLaure Calamy, Arieh Worthalter, Annabelle Lengronne, Alexis Manenti
plateforme
genre
disponibilité
11/10/2024
notes
critique
7
10
A
 © Rémy Grandroques
© Rémy Grandroques
 © Carole Bethuel
© Carole Bethuel
 © Rémy Grandroques
© Rémy Grandroques
 © Carole Bethuel
© Carole Bethuel
 © Rémy Grandroques
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Au lendemain des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, Christelle se rapproche des cercles de survivants, expliquant qu'un de ses meilleurs amis, Vincent, a été grièvement au Bataclan. Confidente de la peine des victimes traumatisées, elle s'engage dans la création d'une association de soutien dont elle devient un des piliers. Le problème, c'est que Vincent n'existe pas et que la personne dans le coma qu'elle visite quotidiennement à l'hôpital est un parfait inconnu. Un tissu de mensonges dans lequel Chris va peu à peu s'embourber…

 

Un thriller psychologique glacial

Nouveau nom du cinéma de genre français, Just Philippot avait étonné avec ses mystérieux et apocalyptiques La nuée et Acide, offrant une certaine bouffée d'air frais au paysage fantastique hexagonal. Sa première réalisation au format série est donc un étonnant pas de côté, un thriller psychologique glacial inspiré de l'histoire vraie d'une mythomane qui s'était inventé un ami dans le coma suite aux attentats, et qui avait fini en prison après avoir demandé des indemnités en se présentant elle‑même comme une rescapée du Bataclan. Une anatomie du mensonge pathologique que Philippot explore le long de quatre épisodes tendus et secs.

 

Si la mise en place peine à démarrer dans un premier épisode inégal, alourdi par des dialogues poussifs et une réalisation très téléfilm qui manque clairement de panache, Une amie dévouée réussit peu à peu à captiver en nous plongeant au cœur du désir maladif de reconnaissance de Chris. Une trajectoire que l'on observe avec effroi comme un accident de voiture au ralenti, chaque nouveau mensonge poussant les curseurs du malaise encore plus loin dans l'attente de l'inexorable découverte du pot aux roses. Autour de Chris, c'est toute une galerie de victimes qui est célébrée en creux, portrait d'une génération frappée de plein fouet par la violence, encore incapable de trouver les mots pour décrire ses traumatismes et tentant de se reconstruire dans la chaleur du collectif. Des personnalités parfois esquissées un peu trop rapidement mais toujours de manière touchante, rendant les mensonges de Chris encore plus inexcusables dans le contexte d'une si grande douleur.

 

Laure Calamy, brillante

Une amie dévouée réussit donc à convaincre et c'est en grande partie grâce à l'interprétation brillante et sur le fil de Laure Calamy (Dix pour cent, Antoinette dans les Cévennes), qui arrive à incarner les ambiguïtés intenables du personnage de Chris : cruelle et calculatrice, dégageant un embarras poisseux dans sa façon de se mettre en avant à chaque nouvelle anecdote fantasmée, elle reste également cette femme qui boit la souffrance des gens comme personne d'autre et réussit à leur offrir une oreille et une épaule dans la douleur, avec ce qui ressemble à une sincérité totale.

 

Égrainant peu à peu les éléments de son histoire personnelle sans jamais vouloir totalement expliquer les mécaniques de sa mythomanie, Une amie dévouée ne cherche pas à faire seulement de Chris un personnage odieux, mais interroge aussi la manière dont elle a pu faire émerger de la consolation et de l'espoir malgré la laideur de ses intentions. De quoi dresser un portrait en clair‑obscur qui fascine et met mal à l'aise en même temps, sans pour autant tomber dans une descente aux enfers. Philippot n'a pas à cœur de punir le personnage principal mais plutôt de faire ressentir cette solitude profonde qui la pousse au pire.

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