Umberto D.
Fonctionnaire à la retraite, Umberto (Carlo Battisti) tente de survivre avec sa maigre pension. Menacé d’expulsion par une logeuse acariâtre (Lina Gennari), le vieil homme trouve du réconfort auprès de la jeune domestique (Maria Pia Casilio) de l’immeuble et de son petit chien bien‑aimé Flike.
Remarquablement scénarisé par Cesare Zavattini (fidèle collaborateur à qui l’on doit Les enfants nous regardent…, Sciuscia, Miracle à Milan et bien d’autres), le film préféré de Vittorio De Sica saisit avec une justesse bouleversante la solitude et la misère sociale auxquelles est confronté cet ancien employé de l’État. Relégué en marge de la société, Umberto D. (D. pour Domenico, le titre même prédestine son personnage à l’anonymat) supporte le quotidien comme un combattant fatigué et tragiquement réduit à l’invisibilité. Sous prétexte de rater leur bus, ses anciens collègues ne lui accorderont pas davantage d’attention que les petits‑bourgeois qui gravitent autour de son horrible propriétaire.
De Sica place les derniers reliquats d’humanité du côté de Maria, la jeune femme de chambre surexploitée, et de Flike, petit animal inoffensif qui devient la raison de vivre du survivant chaplinien. Si le lien magnifique entre le maître et son chien donne lieu à des scènes émouvantes et parfois cocasses (celle du repas partagé en toute discrétion à la soupe populaire ou encore l’autre, célèbre, du Panthéon à Rome, où Flike comme dans un numéro de cirque fait la manche), sa fragilité ainsi que la brutalité du monde engendreront un final qui nous laisse le cœur en morceaux. Un sommet du néoréalisme à (re)découvrir d’urgence.