Tootsie
Michael Dorsey (Dustin Hoffman), un acteur jugé trop tatillon, peine à trouver un nouvel engagement. Il galère tant qu’il décide d'oublier sa vénération pour le théâtre et tente une audition pour une modeste sitcom. Problème : les recruteurs recherchent une femme. Michael va donc se créer un alter ego féminin, Dorothy Michaels, pour obtenir le rôle. Très vite, Dorothy devient une chouchoute des téléspectateurs et lie une forte amitié avec une autre actrice un peu paumée, Julie Nichols (Jessica Lange). Dans le même temps, Michael ‑alias Tootsie‑ découvre aussi les mille et un abus et diktats que ses collègues femmes doivent affronter au quotidien.
Énorme succès en 1982, Tootsie est sorti voilà 38 ans. À l’heure du mouvement #MeToo et d’un Hollywood débarrassé du producteur Harvey Weinstein, on pouvait craindre que le temps n’ait meulé la pertinence du film. Or, les vexations aux femmes, les abus de pouvoir subtils ou grossiers qu’elles endurent au quotidien, ainsi que les diktats sur la beauté féminine que le héros découvre, n’ont pas pris une ride ! Dustin Hoffman, particulièrement bien maquillé, livre un personnage d’autant plus convaincant et touchant que Tootsie ne peut souvent compter que sur son regard pour livrer ses états d’âme.
La mise en scène de Sydney Pollack, si elle s’est parée d’une légère patine vintage sur certaines scènes, notamment celles avec le père de Julie, demeure malgré les décennies d’une grande efficacité tout au long du récit. Tootsie, parti sur un prétexte de vaudeville, parvient à transcender son propos avec une sensibilité jamais démentie. On se réjouit, on s’amuse souvent, mais Tootsie a la politesse de toujours faire réfléchir ses spectateurs. Carton plein ? Presque, car on pourra peut‑être apporter un léger bémol à l’enthousiasme avec l’épilogue un peu hâtif du film. Mais on devra surtout s’attrister. Tootsie, pourtant réalisé à l’issue de la grande poussée féministe des années 70, reste hélas, trente‑huit ans après, d’une brûlante actualité.