The Witcher : le cauchemar du loup
Quelques années avant que Vesemir, Witcher émérite, rencontre son futur pupille Geralt (héros de la série The Witcher sur Netflix), il sauve un jeune noble dont la famille a été massacrée par un Leshen. Les Leshens sont des monstres particulièrement coriaces, mais celui que Vesemir terrasse fait en expirant quelque chose d’impossible : il parle dans une langue disparue, de l’elfe ancien. Vesemir décide d’enquêter sur ce mystère inquiétant auprès des autres Witchers.
Pendant ce temps, à la cour de Kaedwen, puissant royaume nordique où Vesemir opère, la sorcière Tetra tente de convaincre son souverain d’expulser tous les Witchers. Ceux‑ci sont, estime‑t‑elle, de vulgaires escrocs uniquement avides d’or. La sorcière est un temps contrée par Dame Zerbst, une vénérable conseillère royale, mais Tetra n’a pas dit son dernier mot…
Des personnages complexes et tordus
Quelle claque que ce film d’animation et de fantasy pour adultes ! The Witcher : le cauchemar du loup, exclusivité Netflix, a été réalisé par Kwang Il Han, scénariste d’animation dont c’est le premier long métrage. Au scénario, Beau DeMayo, qui avait déjà collaboré au script d’un des épisodes de la série The Witcher menée par Henry Cavill. Si l’on mentionne ce scénariste et sa proximité avec la première saison de The Witcher, ce n’est pas un hasard. Car The Witcher : le cauchemar du loup ose ‑et réussit‑ à peu près partout où la série live The Witcher échouait.
Non seulement ce Cauchemar du loup propose un beau surcroît de violence graphique, mais s’avère surtout infiniment plus fidèle au roman original qui a inspiré la série et ce spin off animé. Le cauchemar du loup propose en effet des personnages bien plus complexes et tordus. Ici, rien n'est manichéen, noir ou blanc : tous les protagonistes, Vesemir compris, évoluent sur des nuances de gris.
Ainsi, les monstres se raréfiant, les Witchers sont effectivement en passe de devenir de beaux escrocs et n’hésitent plus à « inventer » des menaces surnaturelles pour justifier leurs gages colossaux. Et pour les Witchers qui, comme Vesemir, font encore à l’occasion du vrai travail, le prix personnel à payer est colossal.
Mélancolique et tragique
Le cauchemar du loup, ce n’est pas que des personnages réussis, plus riches et plus denses. Le contexte de l’histoire est lui aussi bien mieux mis en avant que dans la série. On découvre ainsi les rares elfes, devenus les amers survivants d’une guerre contre les humains qu’ils ont perdue. On apprend aussi enfin en détail l’épouvantable et criminel entraînement infligé à des gamins pour qu’ils deviennent des Witchers. Tous ces aspects passionnants et crépusculaires n’étaient qu’à peine esquissés dans la série originelle, sinon tout juste évoqués.
Sur la forme, Kwang Il Han ne réinvente pas la poudre. Il épouse les principaux codes des films d’animation nippons avec un Vesemir arrogant et poseur livrant des combats à l’esthétique nerveuse. Mais ce qui séduit le plus dans ce Cauchemar du loup, c’est la tonalité mélancolique et tragique qu’adopte le récit émaillé de nombreux flashbacks sur l’enfance de Vesemir.
La tristesse désenchantée dévoilée par ce Cauchemar du loup n'est rien moins que le cœur même de la saga livresque originelle. Et le film d’animation l’épouse avec une telle hardiesse qu’il s’avère, en 1h23, bien plus riche, scélérat et fidèle que la série originale qui s’appuyait pourtant sur huit épisodes !
On espère vivement que le surprenant et très appréciable virage narratif impulsé par Le cauchemar du loup aura inspiré la saison 2 de The Witcher prévue pour le 17 décembre prochain…