The Whale
Charlie, un professeur d'anglais souffrant du syndrome obésité morbide handicapante et pesant plus de 200 kilos, vit reclus chez lui. Tentant de renouer avec sa fille adolescente qu’il ne voit plus depuis longtemps, pour une ultime chance de rédemption, il l’invite chez lui…
Autant prévenir, on ne sort pas d’une vision de The Whale intact. Un film que l’on vous conseille d’ailleurs de regarder concentré et non avachi sur votre canapé, le portable à la main. Comme la plupart des réalisations de Daren Aronofsky, il nécessite une attention particulière de la part des spectateurs. Mais généralement, ils ne le regrettent pas.
C’est assez réussi !
The Whale est une expérience et une épreuve sensorielle qui ne laissera pas intact. Le réalisateur a fait le choix d’un format 4/3 et ce n’est ni anodin ni une coquetterie auteuriste. Non, il implique un cadrage encore plus séré sur le corps démesuré (plus de 200 kilos) de Charlie (Brenden Fraser) et propulse de fait le spectateur au cœur de sa souffrance. Une souffrance que l’on peut ressentir jusque dans les pores même de sa peau. Sans aucune délicatesse, frontalement, violement, la caméra va chercher les stigmates de sa douleur physique pour mieux nous faire entrer dans sa souffrance mentale. Mais peu à peu, on entre en empathie avec le personnage, à l’instar de sa fille Ellie (Sadie Sink), à la limite de la grossophobie au début du film.
Il y a quelque chose de christique dans cette souffrance et cette trajectoire tout au long du film pendant deux heures, la caméra n’aura de cesse de magnifier son héros d’un halo de lumière, même si son salon refuge reste dans la pénombre. Rien n’est le fruit du hasard dans la réalisation, maîtrisée de bout en bout. Le réalisateur de Requiem for a Dream, de Black Swan ou encore de Mother ! maîtrise son sujet de bout en bout et livre une véritable leçon de cinéma à la fois touchante, délicate et d’une subtile violence.
Un acteur poids lourd
Mais ce que l’on retiendra de The Whale, c’est surtout la prestation de Brenden Fraser (un Oscar à la clé, bien mérité). On est vraiment très loin de la saga La momie (tant mieux). L’acteur, que l’on avait un peu oublié depuis celle‑ci, revient avec force et surtout au premier plan. Il faut dire qu’il était en symbiose totale avec son rôle, tant professionnellement que sans doute personnellement. De presque chaque plan, l’acteur s’est totalement investi dans son rôle de baleine dépressive échouée dans son fauteuil. Sa performance à elle seule vaut le visionnage du film. Toute la mise en scène est d’ailleurs à son service et ses quelques autres partenaires de jeu, également. The Whale tourne tout autour (dans la manière des possibles) autour de Charlie.
Pour une fois, un film tiré d’une pièce de théâtre (écrite par Samuel D. Hunter, également auteur du scénario) ne souffre pas du syndrome théâtre filmé. Au contraire, cette unité de lieu et cette économie de personnages renforcent le sentiment de solitude et d’emprisonnement de Charlie. La scène finale du film n’en devient que plus touchante.