04 novembre 2024 - 15h42

The Substance

année
2024
Réalisateur
InterprètesDemi Moore, Margaret Qualley, Dennis Quaid
éditeur
genre
sortie salle
06/11/2024
notes
critique
8
10
label
A

Une ancienne star hollywoodienne, devenue vedette d’une émission d’aérobic (Demi Moore), est virée le jour de ses 50 ans à cause de son âge trop élevé, renvoyée à son image dans une industrie qui n'épargne rien à ses actrices. Le moral au plus bas, elle reçoit une mystérieuse proposition d'un laboratoire, appelée « the Substance ». Une simple injection offre la possibilité de créer une meilleure version d'elle‑même (Margaret Qualley, The Leftlovers). Seule condition : revenir tous les sept jours dans son ancien corps.

Body double

« Body horror féministe » comme le présente sa réalisatrice Coralie Fargeat (Revenge), The Substance fut la claque du dernier Festival de Cannes qui lui attribuât le Prix du Scénario. Prix certainement mérité mais étonnant au regard de sa mise en scène et de son interprétation qui méritaient également (et sans doute plus) d’être récompensé. Trêve de polémiques, The Substance est un incroyable voyage, malin, maîtrisé, totalement assumé et même radical. C’est peut‑être là son plus grand défaut, s’il fallait lui en trouver un.


Tout dans le film ‑la lumière, l’image, les couleurs, les décors, les sons‑ semble à la fois naturel et artificiel, comme s'il voulait sans cesse nous rappeler qu’il nous parle d’une industrie du faux. Le spectateur est happé, comme hypnotisé par la vision de la réalisatrice qui excelle dans la mise en scène de peu de mots. La séquence d’ouverture, vertigineuse plongée dans la vacuité et l’éphémère de la fame, en est un bel exemple. The Substance se révèle être un étrange mélange de Tati et de Cronenberg au discours ultra‑féministe. Un film qui épouse malicieusement le regard masculin outrancier pour mieux le dénoncer.


À corps et à cris

Les corps sont dénudés, les gros plans sexualisés façon 90’s. Les deux actrices, géniales dans leur rôle double, donnent tout. Elles ne s’épargnent presque rien dans une vertigineuse mise à nu et en abyme de leur condition de femme à Hollywood. La démonstration est d’autant plus magistrale qu’elle est implacable.


Le film nous rappelle constamment le monde hyper‑sexualisé qui nous entoure pour finalement mieux le déconstruire au figuré comme au propre. Ou plutôt au gore. Les corps, souvent filmés en macro, vont souffrir et pas qu’un peu. On savait la réalisatrice peu avare en hémoglobine (ah le final de Revenge !), mais avec The Substance, elle passe un cap très inspiré de la scène de l’ascenseur de Shining. Un film très cité par ailleurs dans The Substance. Le gore oui, mais le gore qui a du sens.


Radical jusqu’à l’extrême, le film se conclut dans une orgie gore qui déroutera pas mal de spectateurs (dont l’auteur de ces lignes). C’est sans doute la volonté du film : ne laisser personne indifférent quitte à bousculer. Car sous ses airs de film de genre, The Substance est avant tout un cri, un ras‑le‑bol de la vision masculine dominante et de sa permanente injonction à la beauté.


Et ce n’est sûrement pas un hasard, d’ailleurs, si le producteur de l’émission d'aérobic, joué par Dennis Quaid, se prénomme Harvey…

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test
4k
cover
-12 ans
Prix : 29,99 €
disponibilité
13/03/2025
image
1 UHD-99 + 1 BD-50, 141', couleurs
2.35
HD 2 160p (HEVC)
HDR Dolby Vision
HDR10
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 5.1
Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
sous-titres
Français pour sourds et malentendants
9.5
10
image

Radicale, graphique, maîtrisée, lookée 90's, ultra‑référentielle et très architecturale avec la salle de bains d'un blanc clinique, l'appartement ouvert comme une fenêtre de cinéma ou le stylisme aux couleurs tranchées, l'esthétique du film est une part importante du récit. Logique compte tenu de son sujet entièrement dédié à la beauté et sa fragilité.

Pour autant, il en ressort une froideur qui colle là encore au tournant gore du film. Beau et laid à la fois, naturel et vidéo, attirant et repoussant, coloré et très noir, voici un film assurément fait de contrastes et doté d'une précision extrême voire chirurgicale, littéralement au scalpel (et pour une fois, la métaphore chirurgicale n'est pas galvaudée). Bref, une claque visuelle que l'on doit notamment à un HDR Dolby Vision impressionnant de densité et de subtilité. Les couleurs sont explosives (wahou les fluos) et pas une seconde du film n'a pas été pensée pour être montrée sous toutes les coutures.

Pour preuve, les très nombreux plans macro du film qui, même à cette échelle, ne trahissent absolument aucun défaut. Une édition au transfert remarquable qui fait honneur aux partis pris et à la vision d'une réalisatrice sur l'irrémadiable fanaison des corps. 

9
10
son

Comme l'image, tout est outrancier côté son, où quand un simple repas ressemble à une orgie grotesque et bruyante. Peu de mots mais du too much à tous les niveaux et un score électro qui revient en permanence, martelant sans cesse le message de cette fuite en avant (ou en arrière, tout dépend) inéluctable. Pour la finesse, on repassera, mais pour les sensations désagréables et les chairs déchirées, overdose garantie sur toutes les enceintes. La circulation du son est aussi folle qu'un cours d'aérobic, gavé de dynamique et d'effets de mise en scène. Chapeau.

2
10
bonus
- Conversation entre Guillermo del Toro et Coralie Fargeat (17')
- Teaser
- Bande-annonce

Un court bonus où le réalisateur Guillermo Del Toro (Le labyrinthe de Pan, Pacific Rim) et Coralie Fargeat échangent au sujet du film. Cette dernière n'explique pas vraiment son postulat de départ (à quoi bon rajeunir si une autre en profite à votre place ?), mais revient sur ce conte gore en dehors de la réalité, qui obéit à ses propres règles. Il s'agissait avant tout pour elle d'un cri, d'un geste de cinéma au féminin. Et Guillermo Del Toro de rappeler une anecdote survenue sur le tournage d'un fim qu'il produisait, alors que l'autorité d'une réalisatrice était remise en cause par une personne de l'équipe.

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