par Jean-Baptiste Thoret
18 février 2011 - 11h40

The Social Network

année
2010
Réalisateur
InterprètesJesse Eisenberg, Justin Timberlake, Andrew Garfield, Max Minghella, Rooney Mara, Brenda Song
éditeur
genre
notes
critique
5
10
A

À 26 ans, Mark Zuckerberg fait donc déjà l’objet d’un biopic. Le fondateur de Facebook croise la route de David Fincher (et du scénariste Aaron Sorkin, créateur de la série À la Maison Blanche) qui, après l’humide marshmallow Benjamin Button, retrouve quelques couleurs mais pas la grande forme que Zodiac laissait entrevoir.

Nous sommes en 2004 lorsqu’un petit génie de l’informatique, un geek speedé comme Hollywood en a filmé des flopées, a l’idée saugrenue de pirater les photos du trombinoscope de Harvard afin de provoquer l’élection sauvage de la plus belle fille du campus. Petit scandale, tollé de l’institution, conseil de discipline, mais Zuckerberg, au fond, s’en contrefout. Deux fils à papa, les frères Winklevoss, lui proposent alors de travailler à une version 2.0 de son happening informatique et de le transformer en réseau social hype pour étudiants triés sur le volet. Zuckenberg récupère l’idée, fait le mort et sort quelques mois plus tard une première version (The Face Book) d’un réseau qui pèse aujourd’hui plusieurs milliards de dollars.

Fincher relate cette épopée à la vitesse grand V et décrit pas à pas la trajectoire météorique de cet ado surdoué et antipathique, obsessionnel et autiste, qui semble avoir très tôt fait le deuil du rapport à l’autre, autrement dit au sexe féminin (tout débute symboliquement le jour où sa petite amie le largue), passant le réel, les affects, l’imprévu et le monde qui l’entoure, à la moulinette d’algorithmes et de programmes codés. D’où l’ironie géniale de ce personnage ni attachant, ni vraiment intéressant (rien ne l’excite plus que de tapoter sur son PC), qui sort de terre un réseau social mondial sur la base d’une incapacité, voire d’une frustration, à établir le moindre rapport à l’Autre. Le même qui ne possède aujourd’hui pas moins d’un demi‑milliard d’amis.

Au fond, c’est la seule chose que l’on retiendra de The Social Network : le film, distant et atone, ne raconte rien d’autre sur Facebook et ses membres (on ne sort jamais de la bulle de ces e‑businessmen qui, entre bières et tirades jargonneuses hyper‑speed, invente le cadre uniforme et fliqué dans le lequel nous exerçons notre liberté), ne verse jamais dans la sociologie de comptoir (comment Facebook a modifié notre rapport au monde ?), ne provoque ni excitation ni ennui véritable, comme si Fincher avait épuisé dès ses premières minutes le potentiel d’un personnage dramatiquement faible et la superficialité d’une épopée aussi sexy que le mode d’emploi d’une machine à laver.

Tandis que Zuckerberg, suite à son premier coup d’éclat, commence à éveiller l’intérêt des filles (chose sur laquelle il semble avoir fait une croix définitive), l’une d’entre elles, pince‑sans‑rire, lui demande si ce « video game » qui fait fureur sur le campus n’est pas cet endroit où des gens ont la prétention de croire que ce qu’ils pensent et vivent mérite d’être « partagé ». Tout est dit.

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blu-ray
cover
Tous publics
Prix : 19,99 €
disponibilité
16/02/2011
image
2 DVD-9, 115', zone 2
2.35
SD 576i (Mpeg2)
16/9 compatible 4/3
bande-son
Français Dolby Digital 5.1
Anglais Dolby Digital 5.1
sous-titres
Français, anglais, anglais pour sourds et malentendants, arabe, danois, néerlandais, finnois, hindi, norvégien, suédois
8
10
image
Fincher, le papa de Seven et son image si particulière, prouve une nouvelle fois sa grande maîtrise du cadre et de la photographie. Entre ambiances Old School avec écoles prestigieuses ancestrales et écrans d'ordinateurs high‑tech comme autant de fenêtres sur le monde extérieur (des vitres partout), le réalisateur opère un savant mélange des genres tout en préservant un rendu grand luxe. Le rendu de ce DVD est de qualité, même si l'on perd la lisibilité si caractéristique des disques Blu-Ray (les meilleurs d'entre eux bien sûr, comme celui de The Social Network). Les contrastes sont également moins francs. N'ayez crainte, c'est techniquement de haute tenue, même si l'aura visuelle du film n'est pas la même en SD.
8
10
son
Comme nous l'indiquions pour le Blu-Ray du film, on est loin du film d'action à effets. Mais la maîtrise de toute la partie sonore force le respect. Dialogues (quasiment un personnage à part entière tellement ils sont denses), spatialisation, gestion des basses, énergie, bande‑son particulièrement ciselée, tout est là, sans en avoir véritablement l'air. Une petite leçon de style qui perd ici un peu en impact par rapport en Blu-Ray. Le message est donc un peu moins clair, surtout sur les passages plus mouvementés, où l'excellente BO de Trent Reznor entre en jeu. La bonne nouvelle, c'est que les basses ne disparaissent pas totalement, bien au contraire, notamment lors de la régate de Henley ou en boîte de nuit. Deux pistes 5.1 appliquées et performantes.
10
10
bonus
- Commentaire audio de David Fincher
- Commentaires audio du scénariste Aaron Sorkin et des acteurs principaux
- Comment ont-ils pu faire un film sur Facebook : making of (87')
- L'ambiance du film par David Fincher et le directeur photo Jeff Cronenweth (Seven, Fight Club…) (3')
- La production selon Angus Wall, Kirck Baxter et Ken Klyce (12')
- Focus sur la BO en studio (13')
- Exploration musicale interactive sur la séquence de la régate de Henley (3')
- Le compositeur Trent Reznor présente le swarmatron, un instrument de musique très spécial (3')
- Analyse multi-angle de la scène VIP du Ruby Skye (10')
Deux DVD pour faire tenir cette interactivité foisonnante et, pour une fois, pas trop promo. On commence par les deux commentaires audio sous‑titrés en français. David Fincher d'un côté et de l'autre le scénariste Aaron Sorkin accompagné des principaux acteurs. Intéressant de bout en bout, notamment celui du réalisateur. On enchaîne avec l'énorme making of à suivre d'une traite ou section par section. Assurément le « gros morceau » de ces bonus, dévoilant les coulisses du tournage, des essais et entraînements des comédiens (notamment l'aviron !), aux répétitions, en passant par les essayages, l'analyse a posteriori de certaines séquences par l'équipe et les effets spéciaux (le visage d'un des frères Winklevoss a été appliqué numériquement sur celui d'un autre comédien pour créer l'illusion de jumeaux, la séquence de la régate bourrée de matte painting). Passionnant. À ne pas louper non plus, le sujet sur l'ambiance du film. Huit minutes au cours desquelles Fincher et son directeur photo Jeff Cronenweth dévoilent les méthodes utilisées pour filmer une scène d'ambiance de rue particulièrement innovante, qui a nécessité trois caméras côte à côte. Impressionnant… Suivent les modules interactifs, notamment sur la musique, souvent oubliée dans les bonus DVD/Blu-Ray. C'est loin d'être le cas ici, et celui sur la régate de Henley, avec comparaison de la musique brute et finale, mixée ou non, vaut vraiment le détour. Merci les basses et le mixage : ça change tout. Assurément LA séquence du film. Vous découvrirez aussi dans un autre sujet le swarmatron, un instrument de musique inventé par deux musiciens de Broocklyn. Le compositeur Trent Reznor nous fait une petite démo et nous explique surtout, scènes du film à l'appui, comment et pourquoi il est utilisé dans le long métrage. Le genre de détail qui tue… À voir aussi, le sujet sur la production (12') où l'on apprend que Fincher a tourné 268 heures de rushs pour son film, et celui sur la scène de la boîte de nuit visible à quatre étapes de production : répétitions (notamment avec Justin Timberlake), décors, tournage et montage. Excellent !
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