par Nicolas Bellet
07 février 2025 - 18h37

The Brutalist

année
2025
Réalisateur
InterprètesAdrien Brody, Felicity Jones, Guy Pearce
éditeur
genre
sortie salle
12/02/2025
notes
critique
9
10
label
A

Survivant de la Shoa, László Toth, architecte juif né en Hongrie, émigre à la fin de la Seconde Guerre mondiale aux États‑Unis. Il ne sait pas si sa femme a survécu ni dans quel camp elle était…

La fin du rêve américain
Fresque épique de plus de 3 heures, The Brutalist se révèle étrangement assez intimiste, tour à tour réflexion sur la résilience et sublime leçon d’architecture. Un équilibre complexe signé Brady Corbet dont ce n’est que le troisième film.


Dès les premières secondes, le ton est donné, la statue de la Liberté est sens dessus dessous, László Toth contemple en effet le rêve américain lors de son arrivée à Ellis Island, mais la tête renversée. La symbolique est forte et le réalisateur ne se privera pas de renouveler l'exercice tout au long de son long métrage au scénario et à la mise en scène incroyablement maîtrisés et signifiants. Comme un écho au courant architectural, issu du Bauhaus, auquel le titre du film fait référence.


Adrien Brody (László Toth) porte tout le film sur ses épaules. Il joue une partition aussi bonne que celle du Pianiste auquel ce Brutalist pourrait d’ailleurs être une suite fantasmée. Cette fresque, c'est la sienne. Le rêve américain à hauteur d’un homme qui ne peut plus rêver depuis que le nazisme a plongé sa vie dans un cauchemar.

 

Il n’est pas le seul à l’écran, même si le film ne compte pas énormément de personnages puisqu’il joue sur l’épure, la symbolique et surtout l’ellipse (comme le rapport entre les jumeaux Harry et Marie, ou le viol de Zsofia). The Brutalist fait clairement confiance aux spectateurs, ce qui est malheureusement de plus en plus rare à Hollywood. Autour de lui, un casting trois étoiles porté par Guy Pearce, génial en ambiguïté permanente, et surtout Felicity Jones, incroyable de force.


Béton désarmé 
Difficile de résumer ce film qui suit son héros sur près de trente ans, tentant de se reconstruire de l’indicible tout en bâtissant un impossible édifice. En lutte contre ses démons, la douleur sourde qu’il ne peut partager et la nature humaine, il ne trouvera l’apaisement que dans l’accomplissement de son projet fou dont la construction s’éternisera. Le rêve américain comme un cauchemar.


The Brutalist est un film complexe qui convoque une multitude de thèmes : l’immigration, l’antisémitisme, le sionisme ou la résilience. Il pose de façon frontale la question de l’art comme force de transcendance, mais sans jamais vraiment y répondre. La fin donne cependant un indice sur l’opinion du réalisateur sur cette épineuse question avec une belle leçon de cinéma et de symbolisme qui invite fortement à un second visionnage du film. Entre réalisation et architecture, le lien est pleinement assumé par The Brutalist qui épouse pleinement la rigueur brutaliste, sans fioritures, brute (et bétonnée), pour raconter son épopée. Le fond et la forme étroitement liés, le film nous embarque d’une traite.


Le poète Goethe, à un moment, est cité dans le film : « Nul n’est plus désespérément esclave que ceux faussement convaincus d’être libres ». Une parfaite exergue.

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