The Assassins
En 198 avant J‑C., deux enfants, la belle Gong Ling et l’intrépide Mu Shu, sont enlevés. De mystérieux commanditaires leur infligent un entraînement cruel destiné à faire d’eux les assassins parfaits de « l’homme le plus puissant du monde ». Devenu adulte, le duo découvre que sa cible n’est pas le piteux Empereur de Chine mais son Chancelier, le seigneur de guerre Cao Cao dont Gong Ling devient la concubine.
Ce drame historique tente plusieurs challenges : offrir un film 100% chinois de l’ampleur de Tigre et Dragon, créer un drame quasi shakespearien autour d’un fameux personnage historique (Cao Cao était le « méchant » du grandiose Les 3 royaumes de John Woo) et procurer un rôle nuancé (le même Cao Cao) à la méga‑vedette Chow « The killer » Yun‑Fat.
Le contrat est presque intégralement raté. Le réalisateur Zhao Lin Shan a pourtant visiblement profité de moyens assez luxueux (décors, costumes) et de quelques libertés offertes par la censure chinoise (on aperçoit ici et là quelques jolis bouts d’anatomie féminine). Le problème est que The Assassins souffre d’un colossal, d’un fatal manque de rythme et d’action. Quand les épées sortent enfin du fourreau, Lin Shan hésite entre effets tape‑à‑l'œil façon Matrix (duel concluant l’apprentissage des assassins) ou hallucinants non‑sens visuels (abus de gros plans dans des mêlées furieuses supposées impliquer des centaines de combattants dans la dernière attaque du château de Cao Cao).
Le réalisateur est tout aussi à la peine pour étoffer son drame historique. Ses efforts pour faire des personnages des deux assassins autre chose que des silhouettes sont vains et désamorcent l’intensité du dilemme de Gong Ling qui, peu à peu, s’attache à l’homme qu’elle est censée assassiner.
C’est pourtant avec le personnage de Cao Cao que le film enregistre son unique réussite : Chow Yun‑Fat offre une relecture intéressante de ce personnage de « méchant » traditionnel : homme vieillissant, malade et tourmenté, son Cao Cao est tantôt inquiétant (dialogue de Cao Cao avec son fils qui l’a trahi), bien flippant (scène de la dégustation des pattes d’ours), tantôt émouvant (coup de théâtre final du film). À ceux qui l’accusaient d'embourber sa carrière avec des rôles médiocres, Chow Yun‑Fat prouve qu’il n’a rien perdu en intensité. C’est bien. Mais c’est trop peu pour sauver le film.