Tár
Cheffe d’orchestre renommée à la philharmonique de Berlin, Lydia Tár (Cate Blanchett) travaille sur la célèbre Symphonie N°5 de Gustav Malher tout en préparant le lancement de son prochain livre. Au sommet de sa carrière, cette femme brillante et très sûre d’elle ne tarde pourtant pas à tomber de son piédestal.
C’est l’histoire d’une évaporation précédée d’une chute. Tár démarre l’horloge avec une masterclass pointue autour de sa carrière et sur la musique classique en général devant une assemblée déjà conquise. Soit une entrée en matière peu conventionnelle, étirée dans le temps mais assumée. Car derrière sa posture d’intello inaccessible, la maestro ne fait preuve d’aucune modération en termes d’hubris.
Durant plus de deux heures, nous suivons cette femme intransigeante qui traverse les arcanes de l’institution musicale avec une rigidité et un sens implacable du calcul. Exit l’assistante (l’actrice française Noémie Merlant) pas suffisamment à la hauteur, effacés les mails susceptibles de lui porter préjudice après le suicide de l’une de ses anciennes élèves. Tár est indéfectiblement tournée vers la musique et son essence pure, vers l’artiste et son œuvre. À la prestigieuse Julliard School, elle recadre un élève qui refuse de jouer du Bach à cause de sa misogynie : « les architectes de votre âme semblent être les réseaux sociaux ». Séquence délectable qui règle son compte à la culture woke et défie l’air vicié du temps prétendument progressiste.
Époustouflante dans son armure jupitérienne, Cate Blanchett (muti‑récompensée pour sa performance) campe ce personnage froid et pourtant faillible, taillé pour un biopic qui n’en est pas un. À voir de toute urgence.