Story of Metal (anthologie du heavy metal et hard rock)
Pour beaucoup, le heavy metal, et plus généralement le hard rock, ressemblent à un monstre bicéphale aux contours plutôt flous, englobant une quantité industrielle de sous‑genres musicaux dont la particularité est de générer suffisamment de bruit pour faire fuir tout mélomane qui se respecte. Évidemment, c'est mal connaître ces courants musicaux qui regorgent de virtuoses complètement fous et dont les origines vont, à travers ce documentaire exceptionnel, en surprendre plus d'un.
Aux commandes de cette Bible du heavy metal ‑et le terme n'est pas exagéré‑, qui réussit la prouesse de pouvoir captiver les fans les plus hardcore comme les novices du headbanging (ces mouvements de tête typiques du public et des musiciens en concert), Sam Dunn, grand escogriffe chevelu (of course) vêtu de noir, qui se met en scène de manière tout à fait naturelle au long de ces onze modules de 42 minutes tournés à l'origine pour la chaîne US VH1.
Musicien, anthropologue et réalisateur canadien, Sam Dunn et son acolyte Scot McFadyen prennent donc la route à travers douze pays (notamment l'Allemagne avec Scorpions) pour remonter aux sources de heavy metal et ses 24 sous‑genres : du pre‑metal des Sixties au progressive metal des années 2010, en passant par la new wawe of british heavy metal de Saxon, le glam metal (ou hair metal), le Grunge (intégré ici dans le courant metal), le nu metal, le shock rock et le power metal. Et ô surprise, à travers le prisme du metal, c'est bien 40 ans de musique tous genres confondus que l'on s'apprête à survoler.
Car le metal, avec son son distordu caractéristique (que l'on doit autant à Sonny ‑sans Cher‑ qu'au producteur Sam Philips et à Peter Townsend des Who), ses décibels en roue libre (rendus possibles avec l'essor des amplis Marshall), ses riffs lourds et ses voix éraillées appelant les ténèbres, est fait, comme toutes les autres musiques d'ailleurs, pour libérer les esprits. Véritable exutoire presque tribal, il peut aussi être une célébration plus positive, une véritable communion où la pensée consciente, bloquée par la puissance sonore, laisse place à la désinhibition du cerveau reptilien. Ça, c'est pour le metal et ses effets sur l'être humain. Mais d'où vient‑il exactement ?
Il vient du blues, comme dirait Johnny. Mais pas seulement. De la musique classique aussi (exemple à l'appui avec Black Sabbath s'inspirant clairement de Gustav Holst pour ses riffs), de l'opéra (Rob Halford de Judas Priest est un grand adorateur de Pavarotti), de la musique militaire (Wagner), du jazz (l'influence de Glenn Miller sur le metal est indéniable), du rock bien sûr (tous les metalleux parlent encore de Little Richard, Hendrix, Elvis, Led Zepplin, Bowie), du punk (Iggy Pop & the Stooges) et même ‑plus incongru‑ de la musique surf, du rock progressif (Genesis, Yes et King Grimson), du garage rock et du rap (voir le rap metal de Korn).
Comme un immense puzzle musical, les pièces, toutes connectées (un genre naît souvent en réaction à un autre, comme le grunge en opposition au glam metal), s'emboîtent les unes aux autres pour former un voyage unique au pays de la musique, de ses esthètes de l'accord et de ses stakhanovistes du riff profond, lourd et rapide. Un voyage inachevé, puisque le metal est en constante évolution et que son histoire est loin d'être terminée.
Une chose est sûre, après ce visionnage, votre culture musicale aura été fortement dopée. Et nul besoin de porter du Spandex (les fameux collants en lycra du glam metal des années 80) pour franchir le pas et apprécier la folie de tous ces grands groupes rassemblés ici par Dunn (même le mythique Yngwie Malmsteen, sorte de Paganini gothique, a daigné faire une apparition dans le film). Un conseil, prévoyez quelques exemplaires en plus tant vous aurez envie, à l'issue de ce film, de partager votre enthousiasme avec vos proches.