Showing Up
Portrait réaliste d’une sculptrice plongée dans le quotidien à quelques jours qui la séparent de sa prochaine exposition.
L’art de rien
Autant prévenir tout de suite, les films de Kelly Reichardt appartiennent à la veine du cinéma indépendant américain, tendance arty. Il ne faut donc pas s’attendre à une quelconque scène d’action propre à faire exploser les enceintes de son Home Cinéma ou dévoiler des nuances de couleurs inconnues jamais exploitées par son écran. Showing Up est un film lent et calme, encore plus que son merveilleux et très pictural First Cow (2019) et certainement beaucoup moins accessible que Night Moves (2013). Plongée dans le monde de la création, ses affres et ses petites manies, le film est à voir comme un autoportrait à peine voilé de la réalisatrice à l’ouvrage.
Lizzy, le personnage principal, est une artiste comme il y en a sans doute des milliers. Ni vraiment célèbre en dehors d’une petite sphère, ni vraiment maudite. Une artiste qui ne vit pas trop de son art, obligée de recourir à un job administratif dans une école d’art pour subvenir vaguement à ses besoins, mais qui expose tout de même. Un personnage rarement vu au cinéma : ni flamboyante, ni exubérante, comme souvent l’artiste est vu dans l’imaginaire collectif. C’est en cela que le film sonne juste et nous touche, pour peu qu’on ait de l’empathie pour elle. Car en plus d’être assez mutique, cette OS de l’art, admirablement interprétée par Michelle Williams, n’est même pas réellement agréable et ne fait rien pour l’être. Elle essaie juste durant tout le film de prendre une douche et de trouver le temps de créer, la date de son expo approchant à grands pas.
Drôle d’oiseau
Film de tout petits riens, de moments d’intensité et d’autres tragicomiques, Showing Up ne laisse pas indifférent. On se retrouve soit bercé, soit assommé par son rythme lancinant, à la limite du contemplatif propre à désarçonner. C’est sa limite. Mais il ne cherche pas l’unanimité, non plus. En cela, il est raccord avec son héroïne…
Pour oxygéner quelque peu son portrait de femme, la réalisatrice a choisi de nous raconter en parallèle l’histoire d’un sauvetage de pigeon. À la foi incongrue et touchante, cette péripétie est en fait le fil rouge du film. Lizzy s’accroche à ce volatile sans réellement que l’on sache pourquoi, et cela crée de fait un décalage comique dans un métrage par ailleurs assez rêche, il faut bien l’avouer. De cet élément perturbateur découlera la métaphore finale du film, celle de l’oiseau qui prend son envol.
Malheureusement, pas vraiment dans la subtilité ! Alors que pourtant, c'était un peu le mantra Showing Up qui, par conséquent, manque son final. Dommage.