Senso
Venise, 1866. Alors que la ville est sous contrôle autrichien et que l’Italie ne tarde pas à être unifiée, la ravissante comtesse Livia Serpieri (Alida Valli) s’éprend passionnément d’un lieutenant du camp adverse, Franz Mahler (Farley Granger). Pour lui, elle est prête à tout et, dans ce contexte politique instable, va même jusqu’à trahir la confiance de ses proches. Néanmoins, elle apprend, brisée, le rapport d’intérêt plus qu’amoureux que lui voue Franz, jeune homme arriviste et prétentieux.
Inspiré de la brève nouvelle de Camillo Boito (1883), le Senso de Luchino Visconti s’attarde surtout sur les faits politiques de l’époque, notamment la bataille de Custoza, illustrée par des séquences de combats virtuoses. Chef‑d’œuvre magistral, Senso se rapproche par bien des thématiques du Guépard, réalisé neuf ans plus tard. L’aristocratie, orgueilleuse et factice, auteur de sa propre déchéance, sombre progressivement dans une sorte de rage passionnelle. Partout dans le cinéma du grand maître italien, les êtres sont condamnés à d’implacables rapports de forces, soit en guerre contre l’Histoire qui les conditionne, soit en lutte contre les démons qui les rongent.
Un portrait pessimiste du genre humain, auréolé d’une pointe de poignante mélancolie.