Route Irish
Après un film léger consacré à un fan de Manchester United (Looking for Eric), Ken Loach a sans doute éprouvé le besoin de revenir à un sujet plus sérieux, et surtout plus conforme aux drames sociaux dont sa filmographie abonde.
Quoi de plus logique donc, pour ce cinéaste dit « engagé », que de croiser aujourd’hui la route de la guerre en Irak ? C’est l’histoire tragique de Fergus et Frankie qui, afin d’échapper à la pauvreté de leur condition, décident de partir en Irak comme mercenaires pour une promesse de rente de 12 000 livres mensuelles. Mais en septembre 2007, soit trois ans après leur départ, Frankie meurt sur la route « Irish », considérée comme la route « la plus dangereuse du monde ». De retour à Liverpool, Fergus décide de mener une enquête sur la mort de son ami.
Le premier quart d’heure de Route Irish laisse espérer un retour de Ken Loach au meilleur de sa forme (formidables scènes d’un Liverpool pauvre mais chaleureux), mais arrivé en Irak, le film vire au thriller poussif et didactique, peu aidé par un acteur, Mark Womack, qui surjoue son désespoir et la culpabilité qui le ronge. Loin de la finesse de Quand le vent se lève, Loach retombe dans ses vieux démons de militant qui enfonce des portes ouvertes (les bavures, c’est mal, la privatisation des forces militaires, c’est pas bien, etc.), reste rivé à une conception datée des rapports de classes, et surtout, qui à force de vouloir décrire les horreurs de la guerre, filme parfois des séquences de tortures rapidement complaisantes.
C’est d’autant plus dommage que le rapport établi entre Liverpool et Badgad, et qui aurait pu constituer le cœur de Route Irish, à la manière du Flandres de Bruno Dumont, passe rapidement à la trappe au profit d’un tract poussif et convenu.