Quadrophenia
Londres, 1964. À peine sorti de l’adolescence, Jimmy (Phil Daniels), issu de la working class, tente de trouver une échappatoire en intégrant le clan des Mods. Les Mods, c’est beaucoup plus qu’un style vestimentaire recherché (jeans cigarette très près du corps, costume étroit cousu sur mesure, parka kaki d’inspiration U.S) et une coiffure minutieuse. Pour Jimmy, c’est un mode de vie. Avec sa bande, les soirées dans les clubs s’enchaînent sous amphétamines et s’achèvent souvent dans l’errance, à bord de leurs scooters customisés. Lors d’une descente à Brighton, des affrontements éclatent avec leurs rivaux de toujours, les Rockers. Jimmy, qui croit puissamment à son idéal « Mod », est brutalement rattrapé par le principe de réalité.
Inspiré du concept‑album éponyme du groupe britannique The Who, Quadrophenia saisit, avec une justesse fascinante, les vertiges et le désespoir d’une jeunesse qui se cherche, en rupture avec les carcans sociétaux qui la conditionnent. Bien sûr, Jimmy se rebelle contre ses parents, se fiche de son travail alimentaire et tente, tant bien que mal, de se forger une identité. Mais celle‑ci, dissoute dans un leurre d’utopie collective, est promise à l’effondrement.
Aux antipodes de Tommy (Kevin Russell, 1975), la musique des Who (l’intégralité de l’album n’y figure pas) s’immisce par à‑coups et déploie ses accords nerveux et dépressifs, à l’image de cette jeunesse désaxée de l’époque. Par ailleurs, le réalisateur Franc Roddam, issu du documentaire, trouve le bon équilibre entre peinture sociale et exploration de la bande originale. Un chef‑d’œuvre.