À propos d'Elly…
Le cinéma iranien, et c’est tant mieux, ne se limite pas aux seuls films d’Abbas Kiarostami. Asghar Farhadi, qui signe ici un quatrième long métrage auréolé d’un Ours d’Argent mérité au Festival de Berlin 2009, débute comme un film de vacances.
Une bande d’amis débarque pour le week-end dans une maison d'été située au bord de la mer. Jeux d’amitié, dragouilles discrètes (les Mollahs sont loin, mais tout de même) et Elly, une jeune institutrice a priori célibataire, invitée par Sepideh (Golshifteh Farahani, aperçue dans Mensonges d’État) dans le but de lui faire rencontrer Ahmad, un jeune homme divorcé résidant en Allemagne.
Ambiance festive et insouciante donc, jusqu’au jour où Elly disparaît. Que lui est-il arrivé ? S’est-elle noyée en tentant de secourir un enfant ? Est-elle rentrée à Téhéran sans prévenir ? Sa disparition pèse alors sur les autres comme celle de Lea Massari obscurcissait brutalement les personnages de L’avventura d’Antonioni.
Très vite, dans le groupe, l’atmosphère se dégrade, la réalité profonde que cachait cette liberté de surface resurgit, les couples se lézardent et l’on plonge dans un drame mâtiné d’angoisse et de suspense.
La force d’À propos d’Elly… tient d’abord dans la qualité remarquable des acteurs, le naturel confondant avec lequel ils jouent, mais surtout dans la description des contradictions qui minent ces classes moyennes iraniennes, désireuses d’accéder à une forme de modernité venue d’Occident, mais toujours hantées par les fantômes de l’archaïsme. Ici, on batifole dans l’eau mais habillé de la tête aux pieds. Le personnage mystérieux d’Elly, dont on va découvrir peu à peu le passé, incarne à lui seul cette schizophrénie. L’un des musts du mois.