Petit Vampire
Sauvé avec sa mère par un pirate fantôme, Petit Vampire a 10 ans… depuis 300 ans ! La compagnie de ses amis monstres ne lui suffit plus : Petit Vampire voudrait bien aller à l’école pour se faire des camarades. Mais c’est doublement impossible : son allure effrayerait les autres enfants et la famille de Petit Vampire est de plus traquée par le terrifiant Gibbous, impitoyable serviteur du Dieu du chaos. Petit Vampire va braver les interdits et se lier malgré tout avec Michel, un garçonnet orphelin que son étrangeté n’effarouche pas.
Victime malheureuse du deuxième confinement, ce film d’animation de Joann Sfar n’a pu se défendre en salle que trois jours et tente donc l’aventure publique presque exclusivement en vidéo. Joann Sfar livre une adaptation de sa BD éponyme et développe cette bienheureuse idée de mélanger un esprit très « Petit Nicolas » avec une imagerie des films d’horreur d’antan de la Hammer que ne renierait pas Tim Burton. Le tout servi sur le décor atypique d’une Riviera inondée de soleil. Ce mix bien dosé sert un joli double message sur l’amitié et la normalité. Mais s’il est plein d’esprit, souvent drôle et toujours mignon, Petit Vampire pêche côté endurance.
Après un prologue enlevé, Joann Sfar s’attarde en effet trop longuement sur l’exposition de l’univers étrange de son héros et sur la mise en place de sa fraternisation avec Michel. Le script souffre d’un ventre mou de quasiment vingt minutes, essoufflement d’autant plus regrettable qu’une fois cette séquence actée, le récit adopte une allure fougueuse, palpitante et même flamboyante pour voguer jusqu’à sa jolie conclusion.
Hors cette problématique affaire de tempo, presque tous les voyants sont au vert. Les monstres, particulièrement Fantomate, le bouledogue de Petit Vampire, sont très drôles. Le film, élégamment animé en 2D, regorge de poétiques trouvailles visuelles (la « bataille navale » aérienne) et scénaristiques (discussion sur la mort, la normalité, jalousie entre la mère de Petit Vampire et la figure de proue féminine du navire pirate). On remarquera aussi que Joann Sfar ne s’est pas contenté d’engager un casting voix cinq étoiles (Alex Lutz, Camille Cottin, Jean‑Paul Rouve…). Tous les doubleurs, y compris Joann Sfar lui‑même, prêtent d’intéressantes et singulières compositions vocales aux principaux personnages sur une bande originale enlevée signée Olivier Daviaud.
Beaucoup d’atouts donc et une œuvre qui fera mouche chez les plus jeunes. Mais en raison d’un récit manquant parfois de tonus et d'un épilogue un peu convenu, Joann Sfar échoue à convaincre les plus grands ainsi qu’à égaler Miyazaki et les grands Pixar, ses références revendiquées.