par Nicolas Bellet
13 novembre 2023 - 16h00

Persepolis

année
2007
Réalisateurs
InterprètesChiara Mastroianni, Catherine Deneuve, Danielle Darrieux (voix off)
éditeur
genre
notes
critique
8
10
label
A

Téhéran, 1978 : Marjane, petite fille de 8 ans, se rêve prophète sauvant le monde. Choyée par des parents modernes, elle vit avec exaltation la chute du régime du Chah.

 

L’enfance de l’art

En adaptant en 2007 avec Vincent Paronnaud ses propres bandes dessinées éponymes, Persepolis, Marjane Satrapi racontait plus que sa propre histoire. Elle parlait de celle de son pays, l’Iran, vu au niveau du regard de l’enfant qu’elle était au moment de la révolution. À la fois drôle, instructif, poétique et saisissant, le film n’est cependant pas que le simple décalque des quatre tomes dessinés, mais un nouveau regard sur son histoire, édulcorant au passage de sa violence (comme la scène de torture du tome 1, ou les dégâts de la bombe du tome 2) et certaines réflexions sur la société iranienne. Marjane Satrapi en profite pour rajouter par touches de la couleur et sans doute un peu d’espoir dans une autofiction qui traite avant tout de l’exil.

 

Le trait de Persepolis version film est semblable à celui des albums, austère, mais dynamisé par l’animation, et beaucoup plus contrasté. Les aplats noir et blanc font place à un jeu sur les tonalités de gris et les dégradés. Le résultat donne un film animé à la fois unique et magnifique. Une épure stylistique au service de la narration. L’image va à l’essentiel et n’empiète surtout pas sur le travail formidable du son, qu’il faut souligner. Car Persepolis est un film qui peut quasiment s’écouter seul : bercé par les voix de Chiara Mastroianni, Catherine Deneuve et de Danielle Darrieux.

 

Les effets sonores et la musique d’Olivier Bernet nous plongent complétement dans une ambiance à la fois réaliste et onirique. On pourrait reprocher que ce parti pris stylisant n’éloigne trop le film de son sujet, le rendant en quelque sorte abstrait. Il n’en est rien, au contraire, Persepolis est à la fois universel et intemporel, et malheureusement très actuel.

 

Drôle de drame

Jamais dans le pathos, Persepolis est aussi une comédie noire, certes, mais drôle et terriblement attachante. Raconter un tel drame à hauteur d’enfant permet d’avoir le recul nécéssaire et un regard naïf sur des événements terribles pour mieux désamorcer l’horreur de ce qui est raconté, sans voile (façon de parler).

 

Malgré des personnages attachants et de géniales péripéties, le film manque sans doute d’un peu profondeur, préférant la caricature et l’ironie. On reste certainement un peu trop dans l’anecdote.

 

Au final, la partie iranienne de Persepolis est plus réussie que la partie européenne, mais qu’importe, le film reste un très beau témoignage autant sur l’Iran que sur le passage à l’âge adulte d'une jeunne femme d'aujourd'hui dans un monde d'hier. À la fois enlevé et bouleversant, un film entre rires et larmes d’une beauté esthétique folle. Une réussite.

sur les réseaux
proposer une vidéo
test
4k
cover
Tous publics
Prix : 24,99 €
disponibilité
18/10/2023
image
1 UHD-66 + 1 BD-50, 95', toutes zones
2.35
HD 2 160p (HEVC)
HDR10
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 5.1
Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
Allemand DTS-HD Master Audio 5.1
sous-titres
Français pour sourds et malentendants, allemand
8
10
image

Doté d'une nouvelle remaserisation 4K, le film de 2007 se montre sous un jour encore plus percutant. Les aplats et les silhouettes noires sont impressionnants, tout autant que les dégradés et les effets charbonneux qui offrent une nuance et une profondeur assez géniales comparées à la BD. Toute la force de la 4K, uniquement ou presque du noir et du blanc. Une plongée dans un tableau abstrait mais diablement expressif.

7
10
son

Là aussi, l'épure l'emporte sur l'esbroufe. Non seulement les voix sont impeccables dans une sorte de non‑jeu proche du réel, mais les ambiances, la musique et les bruitages nous propulsent dans un Iran à la fois loin et proche de nous, où l'imagination prend le relais des cases animées. Avec son débit supérieur, la VF présente une sensation de dynamique accrue. 

7
10
bonus
- Discussion avec Marjane Satrapi lors de l'événement Cinema for Change (inédit) (20')
- Persepolis en 2023 : entretien avec Marjane Satrapi (inédit) (39')
- De l'animatic au film commenté par la réalisatrice (11')
- La face cachée de Persepolis : making of (30')
- Version anglaise du film (avec la voix de Sean Penn, Gena Rowlands et Iggy Pop)
- Livret intégré rédigé par Guillemette Odicino, journaliste cinéma (20 pages)

Outre le making of déjà connu et incontournable (où l'on voit littéralement la réalisatrice mimer toutes les scènes aux animateurs), cette édition 4K se pare de deux nouveautés inédites qui confirment, 20 ans après, toute la force du film de Marjane Satrapi. Le discours de cette dernière n'a pas d'ailleurs changé. Toujours aussi percutante, elle revient sur le contexte actuel en Iran, celles qui se battent au quotidien, et tacle au passage les plateformes qu'elle qualifie de « sorbet » dont on ne peut pas se nourir, contrairement au cinéma, comparé à une « bonne entrecôte ». Du 100% Satrapi. Si vous ne l'avez jamais écoutée parler, c'est le moment.

en plus
soutenir
Recevez l’actualité tech et culture sur la Newsletter cesar
Inscrivez-vous
OK
Non merci, je suis déjà inscrit !