OSS 117 : alerte rouge en Afrique noire
En 1981, Hubert Bonisseur de La Bath alias OSS 117 (Jean Dujardin) s’échappe d’un camp russe pour se retrouver placardisé au service informatique. Peu avant, il a rencontré Serge, alias OSS 1001 (Pierre Niney), un jeune agent qui le vénère comme une légende de l'espionnage. OSS 1001 est choisi pour une mission africaine visant à débarrasser Bamba (Habib Dembélé), tyran favorable à la France, d’un mystérieux mouvement de résistance. Pendant qu’OSS 117 ronge son frein en tentant de comprendre les arcanes de l’informatique, Serge disparaît. Lesignac (regretté Wladimir Yordanoff), le patron du service, décide d’expédier OSS 117 pour mener un discret sauvetage du jeune agent volatilisé.
La belle équipe
Après Le Caire nid d’espion et Rio ne répond plus, cette troisième aventure d’OSS 117 était, pour le barbouze crétin incarné par Jean Dujardin, l'épisode de tous les dangers. Michel Hazanavicius, orfèvre des deux premiers épisodes, avait en effet cédé la main au Césarisé Nicolas Bedos (La belle époque). Et la dernière tribulation d’OSS 117 datait d’un peu plus de douze ans : l’agent secret neuneu avait‑il préservé son public ?
Pour l’épauler dans Alerte rouge en Afrique noire, Nicolas Bedos pouvait néanmoins compter sur un « historique » de la première heure, en l’occurrence Jean‑François Halin, scénariste des deux premiers opus de la saga et de la série Au service de la France.
Le jeune réalisateur (Alerte rouge n’est « que » son troisième film) et son scribe ont évidemment repris l'esprit pastiche inauguré par Hazanavicius. Dès le générique, petite orfèvrerie kitsch, le long métrage se place dans le sillage des premiers James Bond époque Bons baisers de Russie. Jean Dujardin excelle (perfome !) quant à lui toujours à restituer avec gourmandise et bagout l’abyssale ineptie de son personnage.
La cruauté et le cynisme en plus
Alerte rouge en Afrique noire semblait donc initialement parti sur une sage voie ne déviant pas du cahier des charges créé par Michel Hazanavicius. Et l’on craint même, dans les premières minutes, que l’ajout de Pierre Niney, campant un personnage mieux calé dans son époque, ne soit qu’un inutile gimmick bien‑pensant surlignant artificiellement l’attitude ultra‑réactionnaire de 117.
Mais très vite, Nicolas Bedos et Jean‑François Halin instillent à leur histoire deux nouveaux et assez géniaux ingrédients à la potion d'origine : la cruauté et le cynisme. Un pari risqué. Car ces deux épices privent OSS 117 d’une bonne partie de son capital sympathie. On peut rester soufflé par la férocité de « l’épilogue » entre OSS 117 et OSS 1001, ou encore estomaqué par l'immoralité absolue concluant la mission de l’agent français. Mais ces scènes, pour gonflées qu’elles soient, sont pourtant parfaitement cohérentes avec l’univers d’OSS 117 et ont le mérite de lui ouvrir de nouveaux horizons.
Un film à l'humour difficile d'accès
Alerte rouge en Afrique noire est aussi un pari gagné grâce à des gags à tomber (le serpent venimeux, la course, « hisser les couleurs »), d’amusantes allusions politiques (les diamants de Giscard, les visites africaines de Chirac) et d’impressionnantes scènes d’action n’oubliant jamais d’être absurdes.
Sans bouder le film (1,6 million de spectateurs), le public n’a pourtant pas totalement validé le virage crapuleux impulsé à OSS 117. Le film de Nicolas Bedos a eu un succès moindre que Le Caire nid d’espions (2,2 millions de spectateurs) et Rio ne répond plus (2,5 millions). Est‑ce à dire qu’OSS 117 doit rester cantonné dans de sages limites ? Il faut espérer que le public, qui découvrira ou redécouvrira Alerte rouge en Afrique noire à la maison, répondra avec un vibrant non.