Ordure !
Succédant à Trainspotting (Danny Boyle, 1996), Filth, rebaptisé Ordure ! pour sa distribution direct‑to‑vidéo en France, est la seconde adaptation teintée d’humour noir du romancier écossais Irvine Welsh.
En effet, le film, qui connut un énorme succès en salles en Angleterre, n’est pas passé par la case grand écran chez nous, la faute sans doute à l’usage intensif et addictif de psychotropes, aux multiples débordements éthyliques et à la sexualité débridée de Bruce Robertson (James McAvoy, impressionnant) dans le rôle d'un sergent‑détective complètement à l’ouest, prêt à tout pour rafler la promo du siècle.
Ainsi, son investigation sur le meurtre d’un étudiant japonais le projette dans les dédales borderline de ses propres névroses, d’autant plus que chacune de ses péripéties tordues est relatée selon son point de vue. Or, comment distinguer le vrai du faux, l’existence d’une famille qui l’aurait quitté ou que son esprit surcocaïné n’aurait fait qu’inventer ? La personnalité schizoïde de Bruce s’accentue à coups de visions zoomorphiques (lui‑même est terrorisé par son reflet porcin dans un miroir), et pourtant, grâce à la progression de sa déchéance mentale, les nombreuses connexions opaques du récit se délient.
L’enquête policière devenue la descente aux enfers de Bruce s’achève sur un revirement des plus déroutants. Ordure ! s’impose alors comme l’héritier expérimental de Bad Lieutenant (1992) de Ferrara.