par Laurence Mijoin
01 juin 2012 - 10h35

Or noir

VO
Black Gold
année
2011
Réalisateur
InterprètesMark Strong, Antonio Banderas, Freida Pinto, Tahar Rahim, Eriq Ebouaney, Riz Ahmed
éditeur
genre
notes
critique
5
10
A

Quelque part en Arabie, années 1930. Pour régler ses différends avec l’émir Nesib (Antonio Banderas), le sultan Amar (Mark Strong) accepte à contrecœur de lui confier « en otage » ses deux enfants : Saleh et Auda. Et pour sceller leur pacte, les souverains ennemis classent la terre qui les sépare, le corridor jaune, en no man’s land.

Une dizaine d’années plus tard, une compagnie texane débarque dans la contrée de Nesib et le convainc d’exploiter le pétrole de ses sous‑sols. Mais le forage des puits dans la bande de terre interdite brise la promesse faite autrefois à Amar. Auda (Tahar Rahim), devenu un jeune homme pacifique passionné par les livres, va se retrouver pris entre deux feux. Entre son père biologique, homme conservateur mais pour qui l’argent n’a aucune valeur, et son père « adoptif » dont il a épousé la fille (Freida Pinto), personnage prônant un islam plus moderne mais aussi un libéralisme économique…

On avait envie d’aimer le nouveau film de Jean‑Jacques Annaud, fresque historique et épique se réclamant des plus belles heures du cinéma d’aventures hollywoodien, Lawrence d’Arabie en tête. Pour ses références, pour son audace, son désir de ressusciter un genre en voie d’extinction, pour tout ce que le réalisateur pourrait dire de notre société actuelle. Mais, dès les premières minutes, on perçoit l’artificialité de l’entreprise, ces petits détails qui empêcheront le spectateur de passer de l’autre côté du miroir.

Car il faut croire à ces hommes et femmes censément arabes et dialoguant en anglais ‑ceci pour des raisons économiques évidentes‑, langue à laquelle se superposent des accents variables en fonction des interprètes. Antonio Banderas peine à rendre crédible son personnage, surjouant sa diction et son incarnation, trop fringant pour être vrai. Face à lui, l’impérial Mark Strong s’en sort avec les honneurs, bien que le choix même de l’acteur (déjà employé pour des rôles d’Arabes dans Mensonges d’État et Syriana) laisse songeur quant à l’imagination des directeurs de casting.

Mais le plus difficile à croire, ce sont les destinées de ces personnages, grossièrement caractérisés (le petit garçon à lunettes forcément érudit, l’émir capitaliste et ses accessoires bling bling, le Texan cupide aux yeux qui pétillent…). Toute la complexité de cette réalité historique, sociale et géopolitique (la fondation d’un État de la péninsule arabique grâce au pétrole, les relations avec l’Occident et plus particulièrement les États‑Unis, l’opposition de deux visions de l’islam…) est escamotée par une simplification radicale des relations entre les différents protagonistes, le plus improbable étant hélas le héros, incarné par Tahar Rahim (Un prophète), un peu en retrait et moins éclatant qu’à son habitude.

Son histoire personnelle, aux fondations dignes d’une tragédie antique (séparé de son père biologique, orphelin de mère, « adopté » par l’ennemi de son paternel, il sera, on le présume, confronté à un choix cornélien), prend un tournant simpliste et peu crédible : jeune homme binoclard, fort d’esprit mais faible de corps, Auda va devenir en un rien de temps un leader combatif aux techniques de guerre affûtées, doublé d’un sage et d’un talentueux orateur. Au centre du film, son itinéraire ne laisse que peu de place à l’aventure, aux batailles chevaleresques, pourtant de belle ampleur malgré une mise en scène convenue.

Le score majestueux de James Horner et l’immensité des paysages désertiques n’y changeront rien : cet Or noir, trop figé et peu charnel, peine à nous emporter dans un maelström d’émotions.

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Black Gold
Tous publics
Prix : 24,99 €
disponibilité
11/04/2012
image
1 BD-50 + 1 DVD-9, 130', toutes zones
2.35
HD 1 080p (AVC)
16/9 natif
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 5.1
Anglais DTS-HD Master Audio 5.1
sous-titres
Français
8
10
image
Féru d'art, notamment des peintures des orientalistes (Delacroix, Fromentin…), Jean‑Jacques Annaud dit, dans son commentaire audio, s'être inspiré de ces œuvres pour la mise en scène de son film (cadrages, éclairages, décors et costumes…). Ainsi, on retrouve dans Or noir des couleurs éclatantes et des clairs‑obscurs parfaitement restitués par cette édition HD. Profondeur du noir des voiles des femmes, lustre des ors des étoffes, stabilités de l'azur immaculé des cieux ou du sable du désert… Ce Blu‑Ray fait honneur au film, garantissant un bon confort de visionnage, qu'il s'agisse de la compression, très discrète, ou du niveau de détail, satisfaisant sur toutes les échelles de plans.
7
10
son
La VO DTS‑HD Master Audio 5.1 est à privilégier face à la piste française, qui pâtit d'un décalage assez embarrassant des voix des doubleurs sur les dix dernières minutes du film, légèrement en avance par rapport aux mouvements des lèvres des comédiens. Cet écueil mis à part, les deux versions présentent les mêmes caractéristiques : une belle amplitude de la bande originale composée par James Horner, appuyée avec brio par les canaux arrière, ce qui tend à souligner le côté épique de cette fresque historique, des basses vibrantes mais jamais tonitruantes, un mixage équilibré entre voix et sons de l'action et une bonne utilisation du 5.1. En effet, la répartition sur les enceintes arrière distille harmonieusement les bruits d'ambiance, de plus subtil chant d'oiseau au sifflement d'une tempête de sable.
7
10
bonus
- Commentaire audio de Jean-Jacques Annaud
- Or noir raconté par l'équipe du film (48')
- Making of (39')
- Réaliser une scène : story-board et annotations de Jean-Jacques Annaud (13')
- Photos de tournage (3')
- Module sur les effets spéciaux (3')
- Repérage des lieux de tournage (2')
- DVD et copie digitale du film
Passionné par le monde arabe, Jean‑Jacques Annaud assure seul le commentaire audio de son film, jamais avare en anecdotes ou en informations sur les cultures dépeintes dans le film, les origines de leurs costumes, de leurs traditions… Le making of, de près de 40 minutes, propose une vision globale du tournage du film, jusqu'à sa postproduction, n'oubliant pas d'interroger ses principaux acteurs, son réalisateur et son producteur, le mogul Tarak Ben Ammar, qui portait en lui ce projet de film depuis les années 70. Surtout, on y apprend que le film, tourné en partie au Qatar et en Tunisie, s'est déroulé en pleine révolution du Jasmin. Un aspect intéressant qui fait écho au scénario du film. Un bonus instructif bien qu'assez consensuel. Le second bonus de taille, « Or noir raconté par l'équipe du film » (près de 50 minutes), ne présente guère d'intérêt pour qui aura d'abord regardé le making of, puisque bon nombre de propos utilisés dans ce dernier sont repris ici. Un doublon peu utile, qui fait gonfler artificiellement le contenu de l'interactivité. Les autres petits suppléments de l'édition se regardent sans déplaisir, notamment les photos du repérage des lieux de tournage, qui dévoilent des paysages splendides. Enfin, le module consacré aux effets spéciaux fait quelque peu mentir Annaud quant à l'utilisation de ceux‑ci dans son film. Selon le cinéaste, on en trouve très peu dans Or noir. Or, les comparaisons avant/après en split screen prouvent qu'ils sont un peu plus présents que ce qu'assure le réalisateur, qu'il s'agisse des décors ou des batailles.
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