Occupe-toi d'Amélie !
Cocotte parisienne, Amélie (Danielle Darrieux) se voit proposer un mariage blanc pour permettre à Marcel (Jean Desailly), un ami de son amant, de toucher un héritage. Mais, à force de passer du temps ensemble pour convaincre leur entourage de leur idylle, les faux tourtereaux vont commettre un faux pas au cours d'une nuit arrosée. L'amant, flairant la traîtrise, va tenter de les piéger…
Adaptant la pièce éponyme de Georges Feydeau, Claude Autant‑Lara revisite en 1949 cette œuvre du maître du vaudeville avec beaucoup d'habileté. Car malgré l'apparente légèreté de l'histoire (qui repose avant tout sur l'art du quiproquo) et l'hystérie collective qui gagne toute la joyeuse troupe de comédiens, le cinéaste parvient à injecter une modernité assez jubilatoire à la forme, tout en livrant un propos assez irrévérencieux sur la société de l'époque.
Maintenant un rythme effréné sans fléchir, Autant‑Lara manie avec brio la mise en abyme, dévoilant à certains moments, par un lever de rideau ou un contre‑champ en direction du balcon, que les acteurs du film sont en représentation, au théâtre. Et que les spectateurs font également partie du scénario, allant même jusqu'à intervenir physiquement lorsque le cours de l'histoire ne leur convient pas.
C'est là que Claude Autant‑Lara, bousculant les conventions établies, parvient à incorporer un propos caustique à cette satire de la société française, faisant de ces spectateurs intrusifs l'incarnation de la bien‑pensance défendant bec et ongles les institutions jugées intouchables alors : le mariage, l'Église… Ici, le metteur en scène se place donc du côté des libertaires, faisant souffler un léger vent d'anarchie sur ce classique du vaudeville.