Naked War - Les Femen mises à nu(es)
Originaires d’Ukraine, Anna Hutsol, Oksana Chatchko (décédée cet été, elle s'est suicidée) et Alexandra Chevtcheko sont les pionnières du mouvement Femen créé en 2008. Pendant plus d’un an, Joseph Paris a côtoyé ses fondatrices ainsi que les militantes des quatre coins du monde prêtes à rejoindre le combat.
Car le corps exposé, les seins nus, le poing levé et l’échine qui ne courbe jamais, ces « pop activistes », comme l’une d’entre elles se définit, entendent bien revendiquer une posture guerrière, un nouveau langage du corps en guerre contre la mécanique institutionnelle qui le broie davantage qu’il ne le respecte. Lors de l’Euro 2012 en Ukraine, elles brandissent des slogans percutants sur corps grimés, les dérives mercantiles du sacro‑saint football ne passeront certainement pas inaperçus, un an plus tard, elles déboulent dans Notre‑Dame pour faire sonner le glas du règne du pape Benoît XVI. La caméra témoin de Joseph Paris les retrouve toujours du côté des luttes progressistes, quoique le chaos et la violence systématiques qui s’ensuivent lors de chaque happening militant évaluent les limites du corps‑arme face à la brutalité des forces de l’ordre et/ou des détracteurs insultants.
En allant interroger les énergies, les convictions dissimulées derrière chaque assaut surmédiatisé, Joseph Paris confère à l’image sa toute‑puissance évocatrice, à l’instar de ces corps qui véhiculent un message, elle parle d’elle‑même à son tour : « En revoyant mes images, je songeais que si j’avais filmé cette scène d’un angle différent, que si j’avais changé de focale ou adopté un autre choix de montage, le résultat aurait été sensiblement le même. On y verrait les mêmes corps nus, en vulnérabilité, dans une lutte inégale avec des forces plus nombreuses, habillées, armées et violentes. Je tenais la caméra mais c’est elles qui avaient le film ».
Un film brut et sobre, justement.