Midnight Silence
C’est la règle du jeu : la belle et nécessaire visibilité dont bénéficie le cinéma coréen à travers le monde aujourd’hui nous amène aussi des paquets de films médiocres qui n’auraient manqué à personne s’ils n’avaient pas traversé les frontières de la péninsule. Et c’est malheureusement le cas de Midnight Silence, le premier film d’Oh‑Seung Kwon qui nous arrive directement en Blu‑Ray et DVD ce printemps après une sortie en salle l’an passé en Corée. Un thriller qui peine à sortir des clichés du genre malgré les promesses de son intrigue : par une nuit sombre à Séoul, un tueur en série rôde dans les ruelles à la recherche de sa prochaine victime. Mais alors qu’il vient de commettre un kidnapping, il est vu par une jeune femme sourde et muette. Commence alors une course‑poursuite sadique jusqu’au bout de la nuit…
Quiproquos poussifs et mise en scène attendue
Il y avait pourtant quelque chose à créer autour de cette lutte nerveuse entre une héroïne privée de deux sens et un tueur machiavélique, mais encore aurait‑il fallu qu’Oh‑Seung Kwon ait la moindre idée neuve concernant l’un ou l’autre de ses personnages. La présence de la jeune sourde‑muette, plutôt bien campée par Kim‑Joo Jin (pas du tout sourde‑muette), n’est ici prétexte qu’à des successions de quiproquos poussifs avec le reste du casting, ainsi qu’à des moments de suspense où le son de l’action est tout simplement coupé, comme si les personnes sourdes vivaient leur vie avec des boules Quiès. Là où le ressenti de ce personnage différent aurait pu être exploré audacieusement, il ne sert ici qu’à amplifier la faiblesse de la jeune femme innocente poursuivie par son bourreau.
Un serial killer banal
Un manque d’imagination exacerbé par la médiocrité du tueur en série face à elle. Sans motivations claires ni personnalité forte, multipliant sans cesse les rictus de tête à claques plutôt que de susciter le moindre effroi, le film nous sert un serial killer absolument banal : un type avec un mini‑van qui tue des femmes la nuit, parce que c'est de ça qu'un thriller a besoin. Rien ne justifie sa décision de poursuivre pendant toute une nuit cette jeune femme, et aucune de ses actions ne fait preuve d’une quelconque ruse qui saurait chambouler le spectateur. La victime fuit et notre tueur la suit en faisant des regards fous durant 100 minutes qui tournent en rond sans avoir le mérite d’éviter les temps morts. D’autant que pour aller au bout de sa confrontation, Midnight Silence s’autorise son lot de facilités scénaristiques aberrantes : tueur qui apparaît comme par magie, policiers exagérément à côté de la plaque…
Des séquences énergiques
On saura trouver des qualités à la réalisation d’Oh‑Seung Kwon, qui réussit à proposer quelques séquences énergiques dans les multiples courses‑poursuites du film, avec des mouvements de caméra nous plaçant au cœur de l’action. Mais là encore, les clichés reviennent vite, comme dans cette séquence où le tueur détruit une porte à la hache, clin d’œil appuyé à Shining mais faisant plus l’effet d’un copier‑coller paresseux qu’un vrai hommage. Ne reste que l’impression d’un film fait à la va‑vite, abusant de tics usés pour offrir qu’un divertissement comme il en existe tant d’autres. Pas de quoi détrôner The Chaser ou J'ai rencontré le Diable…