Marguerite
Tel un élève appliqué mais pas trop, Xavier Giannoli se bonifie de film en film. Ses sujets, il sait assurément les choisir. Après le fait divers mêlé de drame social avec À l’origine, à qui l'on pouvait reprocher un certain manque d'ampleur et de folie, le cinéaste s’inspire de l’histoire tragicomique de Florence Foster Jenkins, richissime Américaine qui rêvait d’être une diva. Chantant comme une casserole, elle finira pourtant sur la scène du Carnegie Hall et verra ses « prouesses » vocales gravées pour l'éternité. Ce sont ces enregistrements, simulacres à sillons d'une vie rêvée, qui ont présidé à l'écriture de Marguerite.
Catherine Frot, magistrale, campe cette châtelaine bercée d’illusions, à la merci de l’hypocrisie de son entourage et des faux‑semblants (une ribambelle de seconds rôles truculents). Argentée mais délaissée par son mari volage (voir le coup de la panne récurent dudit mari au pied d'un calvaire, symbolique), de son petit personnel à son cercle d'amis jusqu'aux dadaïstes qu'elle fréquentera assidûment, Marguerite (pour Magritte ?) pliera à en crever son entourage à ses nombreuses fantaisies surréalistes, bien plus profondes qu'il n'y paraît.
De folie, d'empathie et d'ampleur, Xavier Giannoli n'en manque cette fois pas le moins du monde. Son image, sa mise en scène, sa reconstitution épurée des années 20 ‑à défaut de budget colossal‑ montrent le meilleur du cinéma français, à la fois populaire et intelligent.