Man of Tai Chi
Tiger, adepte du Tai Chi, une discipline à tort plus souvent assimilée à de la gymnastique qu'aux arts martiaux, commence à se faire une célébrité dans des tournois. Il est contacté par le mystérieux Donaka Mark, soupçonné par la police d'organiser de sanglants combats clandestins. Pour aider son maître menacé d'expulsion, Tiger accepte les combats sauvages proposés par Mark et, peu à peu, se perd dans la violence.
On aurait tellement voulu apprécier ce premier film réalisé par Keanu Reeves. Mais si l'acteur et désormais réalisateur américain prend le risque de tourner un film presque intégralement en chinois, il ne change absolument rien à la grammaire classique des films d'arts martiaux : scénario prétexte, enchaînements de combats, réflexion avortée sur la télé‑réalité, intrigue policière accessoire...
On pourra donc voir Man of Tai Chi comme un hommage ou le considérer comme complètement dépassé. Car The Raid et The Raid 2 sont passés par là, et leur réalisateur, Gareth Evans, a définitivement bouleversé le Bescherelle du genre en y introduisant furie, méchanceté et virtuosité.
Dans Man of Tai Chi, rien de tout cela. Les combats sont soigneusement filmés à l'ancienne ‑malgré un montage parfois un peu trop cut‑, chorégraphiés par un vénérable maître (Yuen Woo-Ping)... mais sentent terriblement la naphtaline. On admire les performances physiques et le ballet des artistes martiaux, mais sans jamais y croire.
Non seulement Man of Tai Chi manque de tripes mais il souffre d'intensité. Keanu Reeves n'arrive pas à maîtriser l'art subtil de la respiration pour conférer énergie et électricité à sa scène quand tout s'anime. Pire, paradoxalement au regard de son entreprise d'hommage, le réalisateur risque une étrange allégeance à la révolution introduite par The Raid, en invitant ‑mais pour un non‑combat !‑ sa star, l'Indonésien Iko Uwais.
On peut trouver sympathique, presque nostalgique cet hommage aux films d'arts martiaux d'antan. Mais Man of Tai Chi sonne surtout comme un ultime adieu.