Mad Men saison 6
En 1968, le rêve américain est balayé par la guerre du Vietnam et une insécurité croissante. Les publicitaires de l’agence ont d’autant plus de mal à survivre à une concurrence de plus en plus sauvage que leur directeur créatif, Don Draper, paraît en totale panne d’inspiration.
Cette saison 6 de Mad Men offre une expérience déstabilisante. Situé en 1968, le cadre historique (années psychédéliques, montée des violences raciales, guerre du Vietnam et cynisme politique) de cette avant‑dernière saison paraissait propice à stimuler le créateur de la série, Matthew Weiner. Le challenge était ardu, les saisons 4 et surtout 5 s’étant révélées d’authentiques chefs‑d'œuvre télévisuels, de pures gemmes combinant subtilité du propos, personnages ciselés et mise en image ouvragée. Mais rien ne paraissait vraiment impossible à une équipe habituée à tutoyer l’excellence. Et patatras ! Mad Men percute les 70’s en se métamorphosant en feuilleton !
Au fil des années, beaucoup ont pu reprocher à la série son rythme flegmatique, parfois même sa « trop grande » (sic !) subtilité. Avec cette saison 6, Weiner et son équipe semblent avoir un peu trop bien entendu ces reproches. Un véritable maelstrom s’empare du récit : portes qui claquent, expériences psychotropes en pagaille, drames, violences, retours de flamme, come‑back inespérés et même émergence d’un étrange alter ego de Don Draper… On n’a pas une seconde de répit ! Tous, à l’exception de Draper (Jon Hamm) justement, paraissent possédés et gesticulent dans une farandole forcenée. En grossissant ‑à peine‑ le trait, on aurait presque envie de dire que, si la patte artistique de Matthew Weiner n’était pas toujours bien présente (dialogues raffinés, mise en image soignée), cette saison 6 pourrait presque s'intituler Amour, gloire et publicité.
Heureusement, quelques repères perdurent. Le Rocher de Gibraltar de la série, Don Draper, maintient ferme sa course suicidaire droit sur un iceberg. Et, alors que l’épilogue se profile, Matthew Weimer sort enfin de son trip scénaristique. Il livre et réalise sans prévenir un final magistralement écrit et mis en scène qui met tout le monde, Draper en première ligne, au pied du mur. On souffle. On tremble. On a eu très peur de perdre Mad Men…