Ma vie pour la tienne
Attention, ce qui suit dévoile des moments clefs de l’intrigue.
La jeune Kate (Sofia Vassilieva) est atteinte d’une leucémie. Lorsque ses parents (Cameron Diaz et Jason Patric) apprennent sa maladie, ils décident, sur les conseils d’un médecin, d’avoir un autre enfant, programmé génétiquement pour être donneur compatible. Cet enfant‑médicament, c’est Anna (Abigail Breslin, Little Miss Sunshine), qui n’a jamais rechigné à donner son sang et sa moelle lorsque sa sœur en avait besoin. Consciente d’avoir été créée dans le seul but de sauver son aînée, lasse des opérations et des séjours répétés à l’hôpital, effrayée par le don d’un rein dont Kate aura besoin pour survivre, Anna dit stop. Elle engage un avocat (Alec Baldwin) pour obtenir son émancipation médicale. Sa mère, ancienne avocate, va plaider sa cause contre sa fille.
Le postulat de départ de Ma vie pour la tienne, adaptation du roman de l’Américaine Jodi Picoult par Nick Cassavetes, avait de quoi surprendre : une fillette se rebelle contre ses parents et devient procédurière pour exister aux yeux des siens. Mais au‑delà du caractère insolite d’un tel procès, ce sont les questions éthiques soulevées par cette histoire de famille souffrante qui devaient monopoliser l’attention du cinéaste. Ce sujet possédait un puissant potentiel subversif. Peut‑on renoncer à aider un proche pour faire valoir ses droits en tant qu’être humain ? Peut‑on mettre en danger une vie humaine pour en sauver une autre, sans aucune garantie de réussite ? Peut‑on se reproduire dans le but avoué de sauver son enfant malade ? À l’heure où les débats sur le clonage humain et thérapeutique font rage, toutes ces problématiques permettaient plus que jamais d’y puiser un film à thèse, laissant toutes les parties s’exprimer.
Si Nick Cassavetes prend soin de donner la parole à chacun de ses personnages (nombreuses voix off), il dépose trop vite les armes en retournant au mélodrame, genre qu’il affectionne particulièrement (N’oublie jamais, She’s so Lovely, John Q.), mais se fourvoie avec un rebondissement ruinant le propos d’origine, qui opposait le libre arbitre à l’abnégation et au don de soi.
Outre les quelques clichés pour illustrer le bonheur fugitif (ralentis, bulles de savon, promenade en famille sur une plage de Californie, musique omniprésente), tous les protagonistes portent de lourds fardeaux, même les personnages secondaires (la juge qui a perdu sa fille dans un accident de la route, l’avocat au mystérieux problème de santé, le grand frère dyslexique, la malade qui a perdu son petit ami, lui aussi frappé par le cancer…). Un peu comme si toute la misère du monde s’était abattue sur un même film. Dommage, les interprétations au diapason de Cameron Diaz, émouvante mère courage obsédée par ce combat contre la mort, et des trois enfants valant à elles seules que l’on s’attarde sur ce drame en demi‑teinte.